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Mesures d'éducation Thérapeutique appliquées au stress en Cardiologie

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LE M'EDITO DU DOCTEUR MEDITAS

LE M'EDITO N°48 - Février 2013

L'amour, toujours l'amour…

Alors que la polémique bat son plein pour savoir si les médicaments pour faire baisser le cholestérol sont utiles ou dangereux et même si le cholestérol porte une quelconque responsabilité dans la survenue des maladies cardiovasculaires, je vais encore vous parler d'amour. Non pas que le cholestérol ne soit pas passionnant, mais je préfère vous parler d'un aspect de la prévention cardiaque nettement plus intéressant à mes yeux.

Je ne peux cependant m'empêcher de dire que j'attends avec impatience la grande campagne que ce vieux monsieur ne va pas manquer de lancer s'il est logique avec lui même. Je veux parler de la lutte anti-tabac qui fait quelques dizaines de milliers de morts en France tous les ans. Ceci dit, passons à ce qui m'importe.

L'autre soir, dans un excellent restaurant de la capitale lorraine, je savourais un merveilleux foie gras maison arrosé d'un sublime verre de vendanges tardives. Quel mauvais exemple de prévention cardiaque, me direz-vous ! Et bien non, tout d'abord une bonne prévention ne consiste pas à ne manger que des carottes tout au long de l'année et de plus j'avais le sentiment d'être au cœur (sic) de la prévention vasculaire. Je dégustais dans un laboratoire préventif expérimental.

J'avais eu un mal fou à réserver cette table. J'avais bénéficié par chance d'un désistement de dernière minute. Le sympathique propriétaire de l'établissement renommé m'avait expliqué au téléphone que depuis quelques années, trouver une table le soir de la Saint-Valentin tenait du prodige. Il fallait maintenant réserver des semaines, voire des mois à l'avance et cet engouement débordait sur les jours précédant et suivant la fête des amoureux. J'avais réservé pour le lendemain et j'avais donc eu beaucoup de chance.

La salle n'était pas très grande, mais chaleureuse. Je remarquais en entrant qu'il n'y avait que des couples. A la lecture de la carte je constatais que tous les plats ou presque répondaient aux canons de la diététique, sauf peut être la tarte Léonie au chocolat. Une merveille, sans doute un peu riche en cholestérol, mais qui m'a tellement rappelé ma grand-mère que j'ai failli en commander une deuxième part.

Au cours du repas je me suis dit que le diner en amoureux de la Saint-Valentin devrait être financé par les caisses d'assurances-maladie. Autour de moi il n'y avait que tendres regards, yeux énamourés, mots doux, mains tendrement caressées, la panoplie complète des couples heureux. Devant une telle unanimité de comportement, j'ai failli demander au patron s'ils étaient réellement amoureux ou s'ils faisaient un exercice de prévention cardiaque après avoir lu l'article paru dans l'European Journal of Preventive Cardiology à la fin du mois de janvier, quelques jours avant la Saint-Valentin (1). Cet article fait suite à d'autres publications qui ont montré que la solitude est néfaste pour le cœur, que les disputes de couple augmentent le risque d'infarctus, mais qu'en revanche vivre une relation de couple amoureux diminue le risque de survenue d'un évènement coronarien et améliore le pronostic en cas de survenue d'un problème cardiovasculaire (2-5).

Au-delà de la polémique sur le cholestérol, les comportements de prévention sont donc assez simples à retenir. Appliquez la règle des 4 A. A comme Activité physique, A comme Alimentation saine, A comme Abstention du tabac et enfin A comme Amour et Affection.

Donnez votre cœur, il vous le rendra au centuple et vous pourrez même faire quelques écarts alimentaires au restaurant le soir de la Saint-Valentin.

Références :

  1. Lammintausta A, Airaksinen JK, Immonen-Räihä P; FINAMI Study Group. Prognosis of acute coronary events is worse in patients living alone: the FINAMI myocardial infarction register. Eur J Prev Cardiol. 2013 Jan 30.
  2. Thurston RC, Kubzansky LD. Women, loneliness, and incident coronary heart disease. Psychosom Med. 2009 Oct;71(8):836-42.
  3. Smith TW, Uchino BN, Berg CA, Florsheim P. Marital discord and coronary artery disease: a comparison of behaviorally defined discrete groups. J Consult Clin Psychol. 2012;80(1):87-92.
  4. Eaker ED, Sullivan LM, Kelly-Hayes M, D'Agostino RB Sr, Benjamin EJ. Marital status, marital strain, and risk of coronary heart disease or total mortality: the Framingham Offspring Study. Psychosom Med. 2007 ;69(6):509-13.
  5. King KB, Reis HT. Marriage and long-term survival after coronary artery bypass grafting. Health Psychol. 2012 Jan;31(1):55-62.

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LES ARCHIVES


LE M'EDITO N°47 - Janvier 2013

Je vous souhaite le temps et l'amour...

Je sais, cette année encore, je suis hors délai pour vous souhaiter une bonne année. Tous les ans c'est la même chose : je me réveille le premier janvier, plein d'entrain, prêt à vous présenter mes vœux illico et puis les jours passent et je ne l'ai toujours pas fait. Soit je suis débordé d'activités, soit j'ai une tendance à la procrastination.

Procrastiner, j'adore ce mot. Je me permets, pour ceux qui n'en connaissent pas le sens, de préciser que ce terme signifie simplement "remettre toujours au lendemain ce qui pourrait être fait aujourd'hui". Ce comportement assez infantile ou enfantin est souvent associé à une faible estime de soi et à un sentiment d'anxiété. Le procrastinateur n'est pas un paresseux, mais il remet toujours au lendemain ce qu'il serait bon pour lui de faire aujourd'hui même.

Je pensais à cela il y a quelques jours en lisant un article très sérieux sur le temps que les humains passent devant la lanterne magique, je veux parler de leur téléviseur.

Quotidiennement, en 2012, chaque Français est resté face à son écran de télévision en moyenne 3 heures et 50 minutes (1). Oui, vous avez bien lu 3 heures 50 minutes, soit plus de 24 heures par semaine, autrement dit 57 jours par an, ou encore, plus de 15% de sa vie. Les enfants étant souvent mis très précocement devant l'écran, chaque français peut espérer, s'il échappe aux problèmes de santé, avoir stationné immobile devant son écran environ 10 à 12 ans de sa vie.

Pourquoi évoquer ces chiffres absolument hallucinants ? Tout banalement pour rappeler que la sédentarité diminue l'espoir de vie, car elle est un facteur de risque de maladie, qu'il s'agisse d'obésité, de diabète, de cancer, de maladies cardiovasculaires (2). Des études récentes montre même que la sédentarité serait la cause principale de la diminution de fertilité masculine constatée depuis quelques années (3).

En revanche, une activité physique régulière entraîne une baisse de la mortalité cardiaque de plus de 35%, une réduction du stress, de l'anxiété et de la dépression de façon plus importante et plus durable que les traitements médicamenteux.

Premier paradoxe surprenant : les effets catastrophiques de la sédentarité sont connus de tous, les bénéfices de l'activité physique sont incontestables et pourtant les français, à l'instar de toute la population mondiale, passent plus de la moitié de leur temps libre devant la télévision. Second paradoxe étonnant : les raisons les plus souvent données pour expliquer une faible activité physique sont le manque de temps et le mauvais temps (4).

La météo pourrait être une excuse de bon sens mais alors comment expliquer qu'en Europe les pays les plus sportifs sont la Finlande, la Suède, le Danemark, et les moins sportifs la Grèce, l'Italie et l'Espagne. Ferait-il plus beau à Helsinki ou Oslo qu'à Rome ou Barcelone ?

3 heures 50 minutes devant la télévision : pourquoi est-il si difficile de prendre 45 minutes de ce temps pour l'activité physique comme cela est recommandé partout même à la télévision? Pourquoi sommes nous incapables d'avoir un comportement dont nous connaissons tous les effets positifs sur la santé. Gérard Reach dans son livre "une théorie du soin" l'explique très bien (5). C'est tout simplement à cause de notre désir de plaisir. D'un côté un plaisir à court terme (se distraire ou se reposer devant la télévision) et de l'autre un plaisir à long terme (être en bonne santé). Or notre cerveau est, selon l'expression de Gérard Reach, impatient. Impatience constitutive, fruit de notre cerveau archaïque qui souhaite toujours un plaisir immédiat. La patience est une aptitude du néocortex ; elle ne survient donc que tardivement dans le développement cérébral. La patience est un comportement adulte.
Etre adulte en santé, c'est être capable de décider ce qui est bon pour soi au-delà du plaisir immédiat. Etre adulte en santé, c'est jouer envers soi-même le rôle que les adultes ont normalement joué quand nous étions enfants en nous protégeant des dangers des comportements à risque. Même si ce cela pouvait être source de déplaisir immédiat, ils nous ont protégés par amour.

Gérard Reach ose employer ce mot un peu tabou à l'ère de l'evidence based medicine. L'amour est un ingrédient du soin. Pour bien prendre soin de soi, il est indispensable de s'aimer, d'avoir de l'estime pour soi et pour bien prendre soin des autres, comme les médecins sont sensés le faire, il faut aussi un peu aimer les patients.

Pour cette année, je vous souhaite donc de l'amour, de l'affection et vous verrez que comme par magie, le temps va se ralentir, le ciel sera plus bleu et le plaisir de bouger deviendra une réalité.

Références :

  1. Audiences télévision : http://bit.ly/UFDr47
  2. Veerman JL, Healy GN, Cobiac LJ. Television viewing time and reduced life expectancy: a life table analysis. Br J Sports Med. 2012;46(13):927-30.
  3. Vaamonde D, Da Silva-Grigoletto ME. Physically active men show better semen parameters and hormone values than sedentary men. Eur J Appl Physiol. 2012;112(9):3267-73.
  4. Shultz JA, Sprague MA, Branen LJ, Lambeth S. A comparison of views of individuals with type 2 diabetes mellitus and diabetes educators about barriers to diet and exercise. J Health Commun. 2001 ;6(2):99-115.
  5. Reach G.Une théorie du soin. Souci et amour face à la maladie. Edition Les belles lettres. Paris .2010

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LE M'EDITO N°46 - Décembre 2012

Je vous en prie, ne mettez pas le père Noël au chômage…

Je vous en prie, messieurs de "l'efficacité financière à tout prix et du hard management", ne mettez pas le père Noël au chômage. "Je sais que vous envisageriez volontiers de le faire, mais ce seul fait d'imaginer une chose pareille me défait, m'insupporte, mais vous ne pouvez pas supprimer le père Noël" (1)

Ne me prenez cependant pas pour un benêt. Je sais bien que le père Noël n'existe pas et que les bonshommes en rouge et blanc aux couleurs de coca-cola ne sont que de modestes salariés souvent soumis au travail précaire ou qui tentent d'arrondir leurs fins de mois difficiles par quelques extras très saisonniers.

Bien sûr, vu de votre côté, le père Noël n'est qu'un petit rouage dans la grande machine économique de l'illusoire "consommez plus pour vivre mieux" et s'il est un jour possible de se passer de ce maillon humain tout en augmentant les bénéfices, vous n'hésiterez pas.

Réfléchissez cependant bien avant de le faire. Je vais vous donner deux arguments pour tenter de vous en dissuader à jamais.

La première raison est que ce licenciement risque d'être économiquement très contre-productif. Un récent article (2) publié dans "Archives of Internal Medicine" par une équipe américaine vient en effet de montrer que la survenue de l'infarctus peut être liée au chômage. Cette recherche a consisté à suivre près de 13000 patients de 51 à 75 ans pendant plus de quinze ans et à étudier les effets du licenciement. Les résultats sont sans appel. La perte d'emploi provoque un risque lié au stress. L'effet est dose dépendant, l'augmentation du nombre d'infarctus est de 25% dans l'année qui suit le licenciement et une perte répétée de travail majore jusqu'à 63% ce sur-risque d'infarctus. Cet effet chômage-infarctus est donc équivalent à celui d'une intoxication tabagique chronique à plus d'un paquet par jour.

Vous imaginez alors l'encombrement des services d'urgences coronariennes un soir de Noël après un licenciement massif des pères Noël ? Des dizaines de brancards responsables d'embouteillages monstres devant les salles de cathétérisme. Et sur ces brancards des dizaines de pères Noël dans leur "rouges" de travail, la gorge serrée, la hotte déposée, la barbe fatiguée attendant l'angioplastie salvatrice. Franchement un tel tableau apocalyptique serait du plus mauvais effet sur la population médusée. Je suis persuadé que les télés nationales et internationales, les radios du monde entier et même radio Vatican rapporteraient l'évènement. Quelle contre publicité. Le lendemain même, la cruauté du monde de la finance serait dénoncée et le Dow Jones , le Nasdaq et CAC 40 chuteraient aussi vite qu'un thermomètre extérieur dans la nuit du 25 décembre.

La deuxième raison pour ne pas licencier le père Noël est la sauvegarde des enfants. Bien entendu un adulte normalement constitué ne croit plus au père Noël du 25 Décembre. Mais imaginez un mois de décembre sans les bonshommes rouges dans les rues et les magasins. Comment dire aux petits enfants que tout cela n'était qu'un mensonge des parents. Quel traumatisme, quel stress, quelles conséquences !

Une autre équipe de recherche américaine (3) vient de montrer que le stress précoce dans l'enfance perturbait le développement cérébral. Cette étude en IRM fonctionnelle réalisée à l'âge adulte démontre que les enfants stressés durant la petite enfance, en particulier les filles, ont moins de connexions entre l'amygdale et le cerveau préfrontal qui régule les émotions négatives. Ceci a pour conséquence d'augmenter l'anxiété chronique alors même que le niveau de stress de ces adultes est faible.

Imaginez alors les conséquences du licenciement du père Noël : des millions d'enfants stressés, futurs adultes anxieux chroniques. Là encore les conséquences économiques risquent d'être désastreuses : comment voulez vous que des adultes anxieux n'ayant plus confiance investissent sur les marchés boursiers ? Comment croire au père Noël de la croissance illimitée quand des individus sans scrupules ont pulvérisé le père Noël de votre enfance ?

En ce mois de décembre, même si le père Noël n'existe pas, tentons de faire "comme si" et "partageons plus pour vivre mieux". Partageons le gratuit. Partageons la joie, le rire, l'amitié, l'amour, le lien familial et social.

En cette période de cadeau permettez-moi de vous faire partager quelques instants de pur bonheur. Je vous offre quelques images (4) du spectacle d'un clown russe génial, Slava Polnopolunie. Du rire, de la poésie, de l'enfance.

Je vous souhaite de bonnes fêtes et surtout ne perdez jamais votre âme d'enfant, celle qui croit à juste titre au père Noël.

Références :

  1. Hommage parfaitement volontaire à Leo Ferré. L'opéra du pauvre. Monologue de la cloîtrée.
  2. Matthew E. Dupre, PhD; Linda K. George, PhD.The Cumulative Effect of Unemployment on Risks for Acute Myocardial Infarction . Arch Intern Med. 2012.
  3. Burghy CA, Stodola DE, Ruttle PL, Molloy EK.Developmental pathways to amygdala-prefrontal function and internalizing symptoms in adolescence. Nat Neurosci. 2012 ;(12):1736-41.
  4. Présentation du spectacle Slava Snow show.

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LE M'EDITO N°45 - Novembre 2012

Les femmes et les enfants d'abord…

Toutes les études épidémiologiques sont d'accord sur un point : ce sont les femmes qui payent le plus lourd tribu à la maladie coronaire. Les compteurs sont au rouge et pourtant nous semblons ignorer cette réalité.

Chaque année 80.000 femmes meurent d'un accident cardiovasculaire soit 54,5% de la mortalité cardiovasculaire globale. Les femmes redoutent à juste titre le cancer du sein et pourtant les maladies cardiovasculaires les tuent 7 fois plus. En 1995, 3,7% des femmes victimes d'infarctus avaient moins de 50 ans, en 2010, ce chiffre atteint 11,6% (1).

Cette surmortalité s'explique de plusieurs façons. Tout d'abord les femmes ont adopté des comportements de vie plus masculins qui s'aggravent ces dernières années : augmentation du tabagisme, du stress, de l'obésité, de la sédentarité. Par ailleurs la symptomatologie féminine est souvent moins typique ou plus exactement les médecins ne sont pas assez attentifs aux symptômes parfois moins classiques que les signes cliniques masculins : il peut s'agir d'essoufflement, de fatigue, d'une oppression et non pas d'une douleur typique à l'effort. Enfin les femmes sont victimes de la croyance très répandue dans le monde médical et dans la population générale en un faible risque cardiovasculaire féminin. Elles sont donc prises en charge avec retard. Je suis ainsi toujours étonné de constater la surprise des femmes en consultation quand je leur dis que l'infarctus du myocarde est une maladie de femme.

Ces données ne sont pas assez connues et les campagnes actuelles (2), en particulier celle de la Fédération Française de Cardiologie destinées à corriger ce manque d'information, doivent être saluées.

Il est cependant une autre réalité généralement négligée qui lie les femmes au développement de la maladie cardiovasculaire : je veux parler de la réalité psychosociale.

J'ai déjà mentionné le stress. Il est manifeste que les femmes sont plus touchées que les hommes par ce fléau moderne. Elles cumulent en effet un stress professionnel et un stress familial et se trouvent souvent dans des conditions de vie beaucoup plus précaires (faible salaire, solitude, famille monoparentale).

Nous avons par ailleurs évoqué dans cette rubrique il y a quelques mois les liens qui existent entre les violences sexuelles faites aux femmes et l'augmentation des comportements à risque ainsi que le développement de maladies chroniques en particulier la pathologie coronaire.

Enfin, et ceci est beaucoup moins connu, cette réalité psychosociale peut affecter les femmes dans leur rôle de mère et avoir un effet "boule de neige" en favorisant le développement de la maladie coronaire.

De nombreux travaux, certains déjà anciens, d'autres beaucoup plus récents démontrent les effets néfastes des troubles psychosociaux durant la grossesse (3). Le stress, l'anxiété, la dépression de la mère vont retentir sur le développement physique et psychique de l'enfant. Les enfants issus de ces grossesses difficiles présentent plus de troubles cognitifs et comportementaux (4).

Ces enfants qui deviendront adultes sont plus réactifs au stress comme s'ils avaient gardé la mémoire de ce stress maternel primitif : leur cerveau limbique émotionnel a été modifié par le stress aigu ou chronique de la mère, par l'anxiété ou la dépression. Les mécanismes invoqués sont d'ordre hormonal (inondation de corticoïdes maternels passant la barrière placentaire) et d'ordre épigénétique.

Ainsi l'histoire se pérennise : les femmes stressées par des conditions de vie de plus en plus difficiles présentent un haut risque d'infarctus et sont susceptibles de donner naissance à des enfants eux-mêmes à haut risque cardiovasculaire. Cette réalité éclaire d'un jour nouveau la notion classique de risque cardiaque familial.

La prévention cardiovasculaire commence donc sans doute beaucoup plus tôt que nous ne l'imaginons. Protéger les femmes, les accompagner durant leur grossesse, protéger la petite enfance, ces missions semblent bien éloignées de l'infarctus du myocarde et pourtant la diminution de la mortalité cardiovasculaire passe sans doute par une prise en charge très précoce. Ceci est vrai pour l'infarctus, mais aussi pour bien d'autres pathologies chroniques comme le diabète.

Ainsi, sans aller jusqu'à dire qu'en matière d'infarctus du myocarde "tout se joue avant six ans", est-il intéressant de mettre en place des programmes de protection de la femme lors des grossesses, en particulier au sein des familles vulnérables.

C'est ce qui a été fait avec un certain succès dans le projet CAPDEP (Prononcez cape et d'épée !) en permettant de diminuer l'impact des phénomènes dépressifs survenus lors de la grossesse grâce à un suivi régulier (5). Ces interventions très précoces ont également l'avantage de sensibiliser les familles au développement psychique des tout petits qui pourront ainsi profiter d'un mode d'attachement plus sécure et répondre de façon plus adaptée au stress de la vie quotidienne (6).

En matière de prévention cardiovasculaire il semble urgent de mettre en œuvre la célèbre consigne prônée dans les naufrages : "les femmes et les enfants d'abord". Il reste cependant à espérer que cette formule devienne une réalité appliquée au quotidien en cardiologie et non un mythe. Une étude suédoise (7) très récente vient en effet de montrer, qu'en dehors de la catastrophe du Titanic en 1912 où 70% des femmes et des enfants furent sauvés contre 20% des hommes, dans tous les autres naufrages survenus depuis un siècle les femmes périssent 2 fois plus que les hommes et les enfants sont les laissés pour compte, seuls 15% d'entre eux parviennent à survivre.

Il faut espérer que les cardiologues masculins seront plus généreux que les capitaines de navire. Hommes, femmes, enfants, nous avons tous à y gagner.

Références :

  1. Hermann D. Le coeur des femmes. Comprendre les maladies cardio-vasculaires pour mieux les combattre. Ed: Robert Laffont. Paris 2012.
  2. États généraux vers un Plan Cœur : www.plan-coeur.fr/
  3. Barker DJ, Eriksson JG, Forsén T, Osmond C. Fetal origins of adult disease: strength of effects and biological basis. Int J Epidemiol. 2002 Dec;31(6):1235-9
  4. Laplante DP, Brunet A, Schmitz N, Ciampi A, King S. Project Ice Storm: prenatal maternal stress affects cognitive and linguistic functioning in 5 1/2-year-old children. J Am Acad Child Adolesc Psychiatry. 2008;47(9):1063-72.
  5. Tubach F, Greacen T, Saias T, Dugravier R, Ravaud P, Tereno S, Tremblay R, Falissard B, Guedeney A. A home-visiting intervention targeting determinants of infant mental health: the study protocol for the CAPEDP randomized controlled trial in France. BMC Public Health. 2012 Aug 13;12(1):648.
  6. Bergman K, Sarkar P, Glover V, O'Connor TG.Quality of child-parent attachment moderates the impact of antenatal stress on child fearfulness. J Child Psychol Psychiatry. 2008 Oct;49(10):1089-98.
  7. Elinder M, Erixson O. Gender, social norms, and survival in maritime disasters. PNAS. 2012 Aug 14;109(33):13220-4.

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LE M'EDITO N°44 - Octobre 2012

Il ne suffit pas de critiquer…

Je suis toujours étonné quand des "personnes intelligentes" ou parvenues à un niveau socioprofessionnel réclamant une certaine dose de discernement émettent des propos dénués de toute subtilité. J'éprouve le même sentiment d'étrangeté quand je vois un cerveau "ruisselant" de connaissances et de culture manquer totalement d'intelligence émotionnelle et d'empathie.

Au cours de ce mois de septembre 2012, deux célèbres professeurs de médecine ont défrayé la chronique en publiant un livre, au titre très provocateur, sans doute passionnant selon les normes de réussite actuelle, puisqu'à l'heure où j'écris, 200.000 exemplaires se sont déjà vendus en moins d'un mois (1).

Félicitations messieurs, vous avez fait du buzz. Je vous conseille de poursuivre dans la même lignée et d'écrire un ouvrage qui fera fureur ; je vous ai déjà trouvé le titre : "le guide des voitures inutiles et dangereuses".

Vous y démontrerez sans aucune difficulté que la voiture coûte trop cher, qu'elle pollue, qu'elle engraisse les constructeurs, qu'elle tue, blesse, estropie, écrase des enfants, brise des familles. Pire, elle commet tous ces crimes dans une totale impunité sans que le garagiste complice, inconscient et profiteur ait fait signer au conducteur-acheteur infantile et immature un consentement éclairé sur les risques potentiels encourus chaque fois qu'il prendra le volant de son véhicule.

Trêve de plaisanterie. Essayons de regarder la question sans polémique inutile. Sortons de ce mode de raisonnement binaire et simpliste qui consisterait à penser que ce type de livre détient toute la vérité ou au contraire n'est qu'un tissu de mensonges et d'inepties. Car telle est bien la technique des manipulateurs : dire une part de vérité pour affirmer que tout est réalité et ainsi provoquer des réactions tellement passionnées que toute discussion constructive devient impossible. Reconnaissons le, tout n'est pas faux dans ce livre et c'est même en cela qu'il est assez pervers. Comme son titre l'indique, il décrit au moins deux réalités qui peuvent nous faire réfléchir.

Le premier fait incontestable est qu'un médicament peut être dangereux. Les effets secondaires gênants, voire dramatiques, des traitements sont connus depuis que les hommes ont commencé à utiliser des plantes et autres breuvages mystérieux. Combien de sorciers et de chamans sont morts pour trouver les posologies adaptées ? Perdre ses cheveux lors d'une chimiothérapie est souvent un des prix à payer pour guérir du cancer et cela sera mieux accepté par le patient s'il est accompagné par l'équipe soignante. Il n'en reste pas moins vrai qu'il est possible de mourir d'un choc anaphylactique après la prise d'une gélule d'antibiotique par exemple ou de voir apparaître des lésions digestives sévères et hémorragiques après la prise d'un banal comprimé d'aspirine. Par ailleurs, il est très difficile d'affirmer avec certitude qu'un effet secondaire tardif ne surviendra jamais. Il est donc indispensable de rester prudent et attentif.

Le deuxième fait est qu'un médicament peut être inutile. Soit parce que le problème de santé est mineur et ne nécessite aucun traitement médicamenteux, soit parce que le médicament n'apporte pas un effet thérapeutique suffisant, soit enfin parce qu'une prise en charge efficace peut être effectuée de façon non médicamenteuse. Ainsi par exemple plusieurs travaux (2) - dont une étude récente sur l'utilisation des antidépresseurs par les médecins généralistes (3) - viennent de rappeler qu'il est inutile de traiter par antidépresseurs les dépressions mineures, que la prescription d'antidépresseurs en cas de dépression majeure améliore l'humeur des patients, mais ne diminue pas les problèmes cardiaques secondaires à la dépression et enfin que les psychothérapies et l'activité physique ont de puissants effets antidépresseurs.

Ceci admis, cela signifie-t il que les auteurs de ce livre ont raison ? Pas du tout. Il ne sert à rien de jeter le bébé avec l'eau du bain, d'affirmer que les laboratoires pharmaceutiques sont des "usines à fric", que les médecins ne pensent qu'à leurs bénéfices et que les patients sont des irresponsables, s'il n'y a pas de propositions constructives.

Messieurs, au lieu de critiquer la prise excessive et intempestive de médicaments qui est bien réelle, proposez et réfléchissez à des alternatives.

Présentez nous une réforme de l'enseignement des études médicales qui intégrerait aussi dans le cursus l'apprentissage des méthodes de traitement non médicamenteux. Faites modifier la cotation des actes médicaux qui privilégie outrageusement les actes techniques au détriment de la consultation et de l'éducation thérapeutique. Oeuvrez pour intégrer, comme cela est fait au Canada, des psychologues dans tous les services hospitaliers. Apprenez aux jeunes étudiants en médecine que la maladie n'est pas seulement la conséquence d'un dérèglement biologique, mais aussi la résultante de composantes psychiques et sociales. Ainsi Monsieur l'urologue parisien, savez-vous que dans le mois qui suit l'annonce d'un cancer de la prostate (et je pense que vous avez dû en annoncer beaucoup), le risque de suicide est multiplié par plus de 20 et celui d'infarctus du myocarde par 5 et que cette réalité doit être prise en compte tout autant que le choix de la méthode de traitement de ce cancer (4) ?

Il est vrai que soigner l'autre est un exercice difficile, périlleux, surprenant parfois, merveilleux souvent, enthousiasmant dans tous les cas. La médecine est un art qui tient souvent du funambulisme, cela demande beaucoup de sagesse, de modestie et d'empathie. Peut-être avez-vous oublié de tremper vos plumes dans ces trois qualités avant d'écrire ?

Il est manifeste que le message le plus intéressant que nous délivre cet ouvrage, n'est certainement pas son contenu très discutable, mais son succès de librairie. 200.000 familles françaises ont d'ores et déjà dépensé 25 euros (non remboursés) pour acheter ce guide. Le message est très clair, nos patients en ont assez de consommer du "tout médicament", ils réclament une prise en charge plus globale comme l'a recommandé l'HAS en 2011 (5).

Tous les acteurs de la santé doivent entendre cette demande et ne pas se contenter de critiquer ce livre très critiquable.

Références :

  1. Even P, Debré B. Guide des 4000 médicaments utiles, inutiles et dangereux. Ed Cherche Midi. Paris 2012.
  2. Dumesnil H et Coll. DREES Septembre 2012. La prise en charge de la dépression en médecine générale de ville.
  3. O'Connor CM and SADHART-CHF Investigators. Safety and efficacy of sertraline for depression in patients with heart failure: results of the SADHART-CHF . J Am Coll Cardiol. 2010 24;56(9):692-9.
  4. Fang F . Immediate risk of suicide and cardiovascular death after a prostate cancer diagnosis: cohort study in the United States. J Natl Cancer Inst. 2010 Mar 3;102(5):307-14.
  5. http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1059795/developpement-de-la-prescription-de-therapeutiques-non-medicamenteuses-validees

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LE M'EDITO N°43 - Septembre 2012

"Le travail, c'est la santé" ?

Les vacances sont terminées et le temps du travail a repris. Je ne sais pas comment cette transition se passe pour vous, mais pour ma part j'ai toujours besoin d'un petit temps d'adaptation avant de reprendre le TGV (travail à grande vitesse) ; la quiétude des vacances me semble plus naturelle que l'agitation professionnelle.

Mon sac de voyage était à peine posé qu'a été publiée dans le Lancet du 12 septembre une étude multicentrique européenne sur les effets cardiaques du stress au travail. Les auteurs de ce travail sont bien connus et sont la référence sur cette question. Ils ont colligé les résultats de 13 cohortes et ainsi suivi entre 1985 et 2006 plus de 200.000 patients. Leur conclusion est sans appel : le stress au travail est un facteur de risque d'infarctus (1).

Cette découverte n'a cependant rien de récent. Le mot travail viendrait du latin "tripalium", instrument de torture utilisé par les Romains. En 1907 dans son livre sur l'angine de poitrine William Osler écrit "un métier à haute responsabilité augmente le risque d'infarctus du myocarde". Il s'agissait d'une triple intuition géniale fondée sur un grand sens clinique. En effet Osler "découvrait" pour la première fois la notion de facteur de risque qui ne sera confirmée que 40 ans plus tard par l'étude de Framingham, et aussi le fait que le stress et plus particulièrement le stress au travail, est une des causes possibles de l'infarctus, ce qui ne sera prouvé à l'échelle mondiale que 100 ans plus tard par l'étude Interheart.

Le stress au travail augmente le risque coronarien de 23 à 68 % selon les études. Il atteint aussi bien les hommes que les femmes, les sujets jeunes que les plus âgés. Les femmes y sont particulièrement sensibles car elles cumulent souvent un stress professionnel et un stress familial dans des conditions de vie parfois difficiles en particulier de solitude.

Un autre travail (2) publié ces dernières années a également montré que la surcharge de travail augmentait le risque d'infarctus de plus de 60% et multipliait le taux de dépression par 2.

Le stress au travail est un sujet dont on parle beaucoup, puisqu'il touche selon certaines statistiques près d'un salarié sur deux et coûterait à la société française entre 30 et 50 milliards d'euros par an ! Rares sont cependant les entreprises qui cherchent à développer une prévention efficace devant ce fléau des sociétés modernes.

Il n'y a bien entendu, comme dans toute question complexe, pas de solution miracle. De multiples pistes peuvent cependant être proposées. Tout d'abord procurer une ambiance de travail la moins génératrice de stress, donner aux personnes la possibilité d'exprimer leur souffrance au travail sans les considérer d'emblée comme des sujets "fragilisés", développer les moyens d'information sur les possibilités de gestion du stress et enfin proposer une prise en charge pour ceux qui sont déjà atteints par le burn-out, la dépression, ou l'anxiété.

Le principal résultat de cette attitude globale est de ne pas banaliser la souffrance au travail et de rappeler qu'il s'agit d'un vrai problème qu'on ne peut ignorer.

Le monde de la cardiologie française l'a bien compris. Alors qu'il n'existait aucun ouvrage sur le sujet, vient de sortir il y a quelques semaines "Cœur et Travail" (3). Il s'agit d'un livre collectif que je vous recommande… avec d'autant plus de plaisir que j'y ai participé pour le chapitre "stress et travail". Publicité bien ordonnée commence par soi-même !

Je vous souhaite une belle année de travail. Epanouissez-vous, sachez aussi vous écouter, vous reposer, prendre du temps pour vous, vous ménager. Rappelez-vous que la demande au travail peut être illimitée, alors que l'adaptation humaine est très limitée.

Pour ma part je vais tenter d'appliquer au quotidien ces quelques conseils, car les cordonniers sont souvent les plus mal chaussés.

Références :

  1. Kivimäki M. Job strain as a risk factor for coronary heart disease: a collaborative meta-analysis of individual participant data. Lancet. 2012 Sep 13.
  2. Virtanen M. Overtime work and incident coronary heart disease: the Whitehall II prospective cohort study. Eur Heart J. 2010 Jul;31(14):1737-44.
  3. Cœur et travail. Sous la direction de Bernard Pierre. Ed Frison-Roche . Paris 2012

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LE M'EDITO N°42 - Juillet - Août 2012

Vacances et Solitude…

Même si pour beaucoup d'entre nous la météo n'est pas fameuse depuis quelques semaines, le temps des vacances est arrivé ; c'est la raison pour laquelle le prochain Medito ne pointera le bout de son nez qu'en septembre.

Temps des vacances, temps des loisirs, du changement, du farniente, du plaisir, mais aussi de la souffrance et de la solitude.

L'autre jour j'étais arrêté dans ma voiture, à un feu rouge, sous un ciel d'orage. Dans l'abribus, à ma droite, des voyageurs attendaient. J'ai eu le regard attiré par une affiche sur laquelle était écrit : "Un animal ne pleure pas". Grande campagne destinée à lutter contre l'abandon des animaux en été.

La vie a pour particularité de faire se côtoyer des situations ou des évènements apparemment distincts, mais qui en réalité s'éclairent, se parlent, résonnent entre eux comme pour nous aider à mieux raisonner. J'avais lu quelques instants auparavant un article du "Quotidien du médecin" faisant part du risque de la solitude pour la santé coronarienne. Faudrait-il faire des campagnes pour la prévention de la solitude et de l'abandon de l'être humain de préférence sponsorisées par la fondation "7 Milliards d'humains" ?

Mais de quoi parle-t-on quand on prononce le mot solitude ? Comme pour toutes choses en ce monde ce mot a deux faces opposées à considérer simultanément et à ne jamais séparer : il est impossible de choisir entre l'ombre et la lumière.

"Amie inestimable, ennemie mortelle. Solitude qui ressource, solitude qui détruit… La solitude caractérise le petit humain dès la naissance et le place dès lors dans une dépendance radicale à autrui… La solitude m'a toujours accompagné, de près ou de loin, comme elle accompagne tous ceux qui, seuls, tentent de voir et d'entendre, là où d'aucuns ne font que regarder et écouter. La solitude nous pousse à atteindre et à dépasser nos limites…" Ainsi parlait Françoise Dolto (1).

Solitude, condition humaine qui doit être affrontée par chacun pour devenir vraiment humain et pouvoir alors se tourner vers l'autre, porteur de la même solitude, pour devenir ainsi non plus seulement solitaires, mais solidaires.

Cette solitude constructive est une chance, mais dans le langage courant, le mot solitude est perçu de façon négative. Il est employé à la place des mots abandon, isolement, manque de lien. L'être humain a besoin de l'autre comme l'a si bien écrit Boris Cyrulnik : "Le bonheur se construit dans le partage, sans la présence de l'autre, nous ne pouvons devenir nous-mêmes" (2).

L'abandon, la solitude non choisie, la perte du lien social entraînent alors des conséquences très néfastes sur le risque de mortalité, sur la santé globale et en particulier coronarienne.

Les premiers travaux sur ce sujet ont été publiés à la fin de années 90 (3,4). Deux publications très récentes sont venues rappeler que le manque de lien social multiplie la mortalité globale des patients de plus de 60 ans par 1,5 et augmente de façon significative la mortalité coronarienne dès l'âge de 45 ans.

Temps de vacances, temps d'abandon des animaux et aussi des humains : en 2008 une équipe italienne a montré que la solitude de l'été était un déclencheur des cardiomyopathies de stress des sujets âgés.

Partons en vacances, reposons-nous. N'oublions cependant pas ceux qui restent et parfois souffrent, en particulier les sujets âgés ou fragiles.

La solitude et le lien sont deux piliers indispensables à l'être humain pour obtenir un équilibre de santé physique et mentale. Apprenons à cultiver notre solitude pour mieux prendre soin de l'autre. Bonnes vacances.

Références :

  1. Françoise Dolto . Solitude. Ed. Folio Essais . 2001
  2. Boris Cyrulnik. De chair et d'âme. Ed. Odile Jacob. Poche . 2008.
  3. Herlitz J, Wiklund I, Caidahl K.The feeling of loneliness prior to coronary artery bypass grafting might be a predictor of short-and long-term postoperative mortality. Eur J Vasc Endovasc Surg. 1998 Aug;16(2):120-5
  4. Hemingway H, Marmot M. Evidence based cardiology: psychosocial factors in the aetiology and prognosis of coronary heart disease. Systematic review of prospective cohort study. BMJ. 1999 May 29;318(7196):1460-7
  5. Perissinotto CM ; Loneliness in Older Persons: A Predictor of Functional Decline and Death Loneliness in Older Persons. Arch Intern Med. 2012 Jun 18:1-7.
  6. Udell JA, Steg PG, Scirica BM, Smith SC, Ohman EM, Eagle KA, Goto S, Cho JI, Bhatt DL, Reduction Of Atherothrombosis For Continued Health Reach Registry Investigators FT. Living Alone and Cardiovascular Risk in Outpatients at Risk of or With Atherothrombosis.Arch Intern Med. 2012 Jun 18:1-10.
  7. Gaibazzi N, Ugo F, Ardissino D. Summertime loneliness as a trigger for all variants of stress-cardiomyopathy in the elderly. Eur Heart J. 2008 Apr;29(7):956.

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LE M'EDITO N°41 - Juin 2012

Sexe, santé et cardiologie

Les cardiologues de toute la planète s'intéressent de plus en plus à la vie sexuelle de leurs patients. Et ceci pour plusieurs raisons.

Tout d'abord parce que la vie sexuelle est un marqueur de santé globale. Je me souviens ainsi avoir participé, il y a près de 30 ans, à un travail où nous avions montré que, sur une population de coronariens opérés, il suffisait de demander à un patient s'il était satisfait de son activité sexuelle pour savoir si le résultat fonctionnel de la revascularisation myocardique était bon.

Par ailleurs les patients sont parfois amenés à évoquer leur vie sexuelle de façon un peu détournée en nous parlant des effets secondaires réels ou présumés de tel ou tel traitement ou en évoquant la crainte de reprise d'une activité sexuelle après un accident cardiaque. Ces questions ne doivent jamais être éludées et il est souhaitable d'accorder au patient tout le temps nécessaire à leur résolution dans un climat de confiance avec le sujet lui-même et son ou sa partenaire s'ils le souhaitent. Le recours à un sexologue peut être proposé.

Depuis quelques années les cardiologues insistent également sur l'apparition de troubles érectiles chez l'homme. Cette dysfonction marque une étape fondamentale, car elle signe une anomalie de la fonction endothéliale, elle-même premier stade de la cascade athéromateuse. Il est donc important en consultation d'interroger les patients sur ce tableau clinique même si celui-ci n'est pas évoqué spontanément. La pratique quotidienne nous apprend que la discussion sur la sexualité est abordée avec beaucoup moins de tabou en 2012 qu'il y a trente ans. La mise sur le marché de médicaments visant à pallier la dysfonction érectile a peut-être eu comme effet secondaire de rendre plus facile l'évocation d'un trouble très banal.

Toutes ces situations sont maintenant bien connues des cardiologues. Les relations entre "cœur et sexe" viennent d'ailleurs de faire l'objet de recommandations de l'American Heart Association il y a quelques semaines (1).

Il est cependant une facette de la relation entre sexe et santé qui n'est quasiment jamais évoquée par les médecins parce qu'elle est encore trop méconnue, beaucoup plus intime, beaucoup plus douloureuse et nécessite une extrême prudence avant d'être abordée. Cette question qui doit cependant être présente à l'esprit des praticiens est celle des abus sexuels dans l'enfance ou la vie adulte.

Même si le sujet est objet de débat pour les psychologues, il n'est pas recommandé pour un médecin non psychiatre de poser une question directe comme cela se fait pour évaluer un facteur de risque tels le tabagisme, la sédentarité, ou le niveau de cholestérol.

Comment faire alors sans poser la question ? Le maitre mot est le respect de la personne humaine, de son intimité, de son irréductible singularité comme l'a si bien dit Alexandre Jollien (2).

Tout d'abord, savoir que l'abus sexuel dans l'enfance est fréquent, une récente étude allemande cite le chiffre de 14% (3), que la majorité de victimes ont enfoui ce traumatisme au plus profond d'eux-mêmes, voire l'ont "oublié" et ne souhaitent pas le réactiver et qu'enfin fréquemment, c'est seulement au cours d'une prise en charge psychothérapique que cette souffrance sera "dé-couverte" par le patient. Un tel vécu a demandé la construction de mécanismes de défense qu'il faut savoir respecter.

Ensuite y penser, évoquer cette possibilité devant certains troubles cliniques : stress chronique, dépression, anxiété généralisée ou troubles du comportement (boulimie, alcoolisme, tabagisme majeur rebelle à toute tentative de sevrage) et enfin proposer une prise en charge psychologique sans pour autant avoir la certitude diagnostique d'un abus sexuel car telle n'est pas la question (4-6).

Comme Edwards et Anda l'ont montré, la violence sexuelle sur un enfant ou un jeune adulte provoque une succession de réactions en chaîne : altérations sociales, cognitives et émotionnelles, adoption de comportements à risque, problèmes sociaux et de santé.

Les conséquences concernent aussi bien la survenue de cancers, de maladies cardiovasculaires, pulmonaires, digestives que la mortalité prématurée (7,8). La prise en charge psychothérapique la plus adaptée (9) en psychothérapie brève semble être l'EMDR (Eye Movement Reprocessing and Desensitization).

Ainsi donc il existe de nombreux ponts entre sexualité, santé et cardiologie. N'oublions toutefois jamais que la santé est en grande partie déterminée par notre parcours d'enfance. Il faut parfois penser au traumatisme complexe provoqué par un abus sexuel dans l'enfance sans pour autant poser une question trop intrusive… Ce serait une autre forme d'abus.

Références :

  1. Levine GN, Steinke EE, Bakaeen FG, et al. Sexual activity and cardiovascular disease. A scientific statement from the American Heart Association. Circulation 2012; DOI:10.1161/CIR.0b013e3182447787.
  2. Alexandre Jollien . Eloge de la faiblesse. Editions Cerf. 1999.
  3. Häuser W, Schmutzer G, Brähler E, Glaesmer H. Maltreatment in childhood and adolescence: results from a survey of a representative sample of the German population. Dtsch Arztebl Int. 2011 Apr;108(17):287-94.
  4. Jun HJ, Austin SB, Wylie SA, Corliss HL.The mediating effect of childhood abuse in sexual orientation disparities in tobacco and alcohol use during adolescence: results from the Nurses' Health Study II. Cancer Causes Control. 2010 Nov;21(11):1817-28.
  5. Smith SG, Breiding MJ. Chronic disease and health behaviours linked to experiences of non-consensual sex among women and men.Public Health. 2011 Sep;125(9):653-9
  6. Clark DB, Thatcher DL, Martin CS. Child abuse and other traumatic experiences, alcohol use disorders, and health problems in adolescence and young adulthood. J Pediatr Psychol. 2010 Jun;35(5):499-510.
  7. Wegman HL, Stetler C.A meta-analytic review of the effects of childhood abuse on medical outcomes in adulthood. Psychosom Med. 2009 Oct;71(8):805-12
  8. Murray-Close D, Rellini AH.Cardiovascular reactivity and proactive and reactive relational aggression among women with and without a history of sexual abuse. Biol Psychol. 2012 Jan;89(1):54-62. Epub 2011 Oct 1.
  9. Posmontier B, Dovydaitis T, Lipman K. Sexual violence: psychiatric healing with eye movement reprocessing and desensitization. Health Care Women Int. 2010 Aug;31(8):755-68

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LE M'EDITO N°40 - Mai 2012

L'annonce et les dégâts collatéraux

Le Medito du mois de Février 2011 avait évoqué l'augmentation du risque de suicide après survenue d'un infarctus du myocarde. Cette problématique concernait surtout les sujets jeunes n'ayant pas nécessairement d'antécédents psychiatriques. Nous avions alors insisté sur la nécessité d'un accompagnement psychosocial pour pallier le traumatisme lié à la survenue brutale de la maladie coronaire.

Un article récent du New England Journal of Medicine (1) donne un nouvel éclairage à ce temps si particulier de l'annonce du diagnostic. Plusieurs travaux publiés ces dernières années avaient déjà mis en évidence une augmentation du taux de suicide et d'infarctus du myocarde après découverte d'un cancer de la prostate. Une équipe suédoise a repris les données actuellement connues et vient de montrer que dans la semaine qui suit l'annonce d'un diagnostic de cancer le risque de suicide est multiplié par 12,4 et celui de décès cardiovasculaire par 5,6. Pour les auteurs de ce travail l'explication est simple : le stress et la déstabilisation psychologique du patient sont à l'origine de cette double mortalité. Comme l'écrit Fang Fang en conclusion de cet article : "Le suicide et la mort cardiovasculaire reflètent la partie émergée de l'iceberg de l'anxiété et des troubles de l'humeur déclenchés par l'annonce d'un diagnostic de cancer".

Ces chiffres doivent être rapprochés d'autres données anciennes qui ont été confirmées par des études plus récentes. En 1984 une équipe de psychologues a étudié le temps de parole dont disposait un patient en consultation pour exprimer sa plainte (2). Ces travaux ont montré que moins deux minutes étaient nécessaires et suffisantes à un malade pour exprimer son motif de consultation et ses ressentis. D'un autre côté le médecin interrompait le discours du patient en moyenne au bout de 18 secondes et seulement 23 % des consultants reprenaient la parole après cette interruption. Une étude plus récente montre même que ce taux de reprise serait en réalité inferieure à 10% (3).

Pourquoi mettre en perspective cette augmentation du risque de mortalité cardiaque ou par suicide et celui du temps de parole du patient ? Simplement pour rappeler que l'annonce d'une maladie est un véritable traumatisme. En une fraction de seconde un monde bascule et rien ne sera plus jamais comme avant pour le patient et pour son entourage. De nombreux patients décrivent le moment où ils ont appris leur diagnostic comme un traumatisme et présentent des signes cliniques évocateurs d'un syndrome de stress post-traumatique (4). Cela a été particulièrement étudié pour le cancer mais peut se rencontrer dans toute autre maladie (5).

En tant que soignants mesurons bien le poids des mots que nous employons, n'oublions pas par exemple que le mot "tumeur" peut aussi être entendu comme "tu meurs". Laissons surtout une place suffisante au patient pour l'expression de ses sentiments, des ses peurs, de ses émotions. Ce temps, ce silence parfois, n'est pas du temps perdu dans la consultation, c'est au contraire un temps gagné pour l'évolution du patient. Les émotions fortes et souvent ambigües ressenties au moment de la découverte de la maladie, la colère, la peur, la tristesse, le désespoir doivent pouvoir être formulées. Ne pas laisser cette possibilité au patient, c'est faire le jeu du déni prolongé, de la résignation, de la dénégation qui font le lit de la dépression, elle-même facteur de mauvais pronostic dans toutes les maladies chroniques.

Faisons en sorte de ne jamais oublier cet aphorisme attribué à Carl Gustav Jung : "tout ce qui ne s'exprime pas, s'imprime".

Références :

  1. Fang F, Fall K, Mittleman MA, Sparén P, Ye W, Adami HO, Valdimarsdóttir U.Suicide and cardiovascular death after a cancer diagnosis. N Engl J Med. 2012 Apr 5;366(14):1310-8
  2. Beckman, H.B , Frankel, R.M. (1984). The effect of physician behavior on the collection of data. Annals of Internal Medicine, 1984, 101, 692 – 696.
  3. Langewitz W. Spontaneous talking time at start of consultation in outpatient clinic: cohort study. British Medical Journal, 2002,325, 682 – 683.
  4. Einsle F, Kraft D, Köllner V.Post-traumatic stress disorder (PTSD) in cardiology and oncology - which diagnostic tools should be used? J Psychosom Res. 2012 Jun;72(6):434-8.
  5. Bacqué MF. Annoncer un cancer. Ed Springer 2010.

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LE M'EDITO N°39 - Avril 2012

Ben mon colon…

Le Medito du mois dernier était plein d'une légitime indignation. Ce mois-ci, est-ce la douceur (toute relative) du printemps qui me fait de l'effet, la vision des cerisiers en fleurs depuis la fenêtre de mon bureau qui me réjouit ou le chant des oiseaux qui me fait siffloter ? Je ne sais pas, mais je me sens gonflé d'optimisme devant la prodigieuse intelligence du monde et des êtres humains.

Certaines découvertes scientifiques sur l'incroyable mécanique humaine me laissent béat d'admiration. Je reste émerveillé devant tant de mystère. Laissez-moi vous faire part de mon dernier sujet d'étonnement.

Notre appareil digestif contient la flore intestinale. Cette dénomination printanière désigne les colonies de bactéries qui pullulent tout le long de cette tuyauterie digestive. Si vous souhaitez faire plus savant, vous pouvez employer le terme scientifique reconnu actuellement de microbiote intestinal, mais à mon humble avis c'est beaucoup moins poétique.

Cette flore dont le poids global peut atteindre deux kilos fait partie de notre patrimoine génétique ; elle nous est transmise par notre mère au moment de l'accouchement. Elle représente un véritable monde à elle toute seule : imaginez environ 10 000 milliards de bactéries réparties en plus de 150 espèces différentes. Ces petites "bestioles" ne se contentent pas d'avoir un rôle fondamental dans la digestion ; elles sont en réalité indispensables à notre survie. Leurs fonctions vont de la fabrication de vitamines à la maturation du système immunitaire. Il est ainsi parfaitement démontré que le développement de la flore intestinale joue un rôle dans la survenue de l'asthme chez l'enfant.

Mais, me direz-vous, quel rapport avec le stress, l'anxiété ou la dépression ? Pourquoi parler de tripoux au fumet si particulier et d'Escherichia Coli à la réputation douteuse ? Pas d'impatience, poursuivons ce petit voyage dans nos entrailles.

Nous savons depuis longtemps que nos émotions ont des effets indéniables sur notre fonctionnement intestinal. Qui n'a entendu son ventre gargouiller lors d'un stress aigu ? Qui n'a éprouvé un jour ou l'autre à la veille d'un examen ou d'un entretien décisif ce que le langage populaire dénomme la diarrhée des batailles ? Le cœur palpite et l'intestin s'active sous l'effet d'une émotion importante, cela n'a rien d'un scoop, mais avez-vous déjà entendu parler de l'axe cérébro-digestif, plus connu sous son patronyme anglais de "brain-gut axis" ?

De quoi s'agit-il ? Au-delà des petites perturbations de la motilité colique d'origine émotionnelle, de nombreuses publications montrent que la flore intestinale elle-même est perturbée par notre humeur, en particulier par la dépression et l'anxiété. Cette modification favoriserait le déclenchement de réactions inflammatoires néfastes à la fois pour le tube digestif, mais aussi pour le cœur, les articulations et la peau.

La suite est encore plus surprenante. Quand vous mangez une andouillette AAAAA ou des tripes à la mode de Caen, avez-vous conscience de déguster un condensé d'intelligence ? Non, et bien, vous avez tort.

En effet depuis quelques années des équipes de chercheurs travaillent sur les connexions cérebro-digestives non plus centrifuges, mais centripètes (la blague est un peu facile…) et plus précisément sur le transfert d'informations entre le tube digestif et le cerveau.

L'équipe du Professeur Stephen Collins de l'université d'Hamilton au Canada vient de montrer que la flore intestinale a un impact sur les fonctions cérébrales. Ainsi la perturbation de la flore intestinale par un antibiotique favorise-t-elle un comportement anxieux et des modifications dans la croissance cellulaire au niveau du cerveau limbique, pilier de notre univers émotionnel. Plus incroyable encore, l'inversion de la flore intestinale par transplantation chez deux souches de souris, l'une anxieuse et timide, l'autre curieuse et exploratrice, inverse leur comportement : les craintives deviennent téméraires et les audacieuses finissent effarouchées.

Ces découvertes sur le comportement bidirectionnel de l'axe cérébro-digestif sont d'une importance majeure pour la compréhension des maladies inflammatoires du tube digestif et pour leur association avec la pathologie psychiatrique.

Au-delà de cette réalité strictement scientifique ces travaux mettent en lumière l'infini complexité du vivant. Notre cerveau sépare pour mieux comprendre, nous divisons le corps en organes pour mieux le soigner et souvent nous oublions qu'il existe une fabuleuse intelligence corporelle, un transfert permanent d'informations entre nos organes et entre les cellules de chacun de nos organes.

Ce qui est vrai pour la flore intestinale et le cerveau, l'est tout autant pour le cœur et le cerveau. L'information circule dans les deux sens. Le psychisme influence le système cardiovasculaire et le cœur est certainement un générateur d'informations pour tout notre corps. De quelle façon ? Personne ne le sait. Peut-être par un mode vibratoire ? Souvenons-nous que le premier battement du tambour cardiaque survient au vingtième jour de la vie intra-utérine.

Il reste encore d'incroyables découvertes à faire. En attendant prenez bien soin de vous et de ce corps où la vie frissonne si magnifiquement.

Références :

  1. Marc Gozlan.La flore intestinale joue avec notre mental. Le Monde Science et Techno du 23 mars 2012.
  2. Bercik P, Collins SM. Microbes and the gut-brain axis. Neurogastroenterol Motil.2012 Mar 8.
  3. Wu JC. Psychological Co-morbidity in Functional Gastrointestinal Disorders: Epidemiology, Mechanisms and Management. J Neurogastroenterol Motil. 2012 Jan;18(1):13-8.
  4. Grenham S, Clarke G, Cryan JF, Dinan TG.Brain-gut-microbe communication in health and disease. Front Physiol. 2011;2:94.
  5. Neufeld KA, Kang N, Bienenstock J, Foster JA. Effects of intestinal microbiota on anxiety-like behavior. Commun Integr Biol. 2011 Jul;4(4):492-4.
  6. Taggart P, Critchley H, Lambiase PD. Heart-brain interactions in cardiac arrhythmia. Heart. 2011 May;97(9):698-708.

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LE M'EDITO N°38 - Mars 2012

Au-delà de cette limite votre ticket de deuil n'est plus valable…

Il y a des jours où j'ai envie de tremper la pointe de mon stylo dans un encrier noir d'indignation. Aujourd'hui, c'est le cas.

Connaissez-vous le DSM ? Non, il ne s'agit ni d'une nouvelle voiture ni d'un modèle récent de console de jeux pour enfants. DSM, est l'acronyme de "Diagnostic and Statistical Manual of mental disorders".

Il s'agit d'un manuel de référence édité par l'Association Américaine de Psychiatrie (APA) qui classifie et catégorise les critères diagnostiques et statistiques des troubles mentaux. Régulièrement mis à jour depuis sa première parution nous en sommes à l'heure actuelle au DSM IV publié en 1994 et révisé en 2000.

Le DSM a été l'objet de nombreuses critiques (manque de rigueur, conflits d'intérêt, relations troublantes avec l'industrie du médicament). Un ancien directeur de la commission du DSM s'est même montré très critique à l'égard de cette instance à qui il a reproché de faire du "disease mongering". La traduction littérale de cet anglicisme est "fabrication de maladie"… il s'agit d'une façon polie de dire que le DSM médicalise de plus en plus le psychisme pour le plus grand profit de certains.

Il est ainsi très intéressant de noter l'allongement progressif de la liste des affections considérées comme relevant de la psychiatrie depuis la première élaboration : en 1952 le DSM I en diagnostique 60. La liste s'allonge à 145 pour le DSM II, à 292 pour le DSM III et enfin à 410 pour le DSM IV.

Pour la prochaine mouture, le DSM V annoncé pour Mai 2013, les experts de l'APA se sont penchés sur le deuil. Oui, vous avez bien lu, sur le deuil. D'après les dernières informations, il semble que cet aréopage de psychiatres accorde quinze jours pour faire son deuil. Oui, vous avez bien lu, 15 jours. Au delà de cette limite tout sentiment de profonde tristesse, tout coup de blues aigu, tout sanglot incontrôlable seront considérés comme les témoins d'une dépression pathologique et traités comme tels, bien entendu de préférence avec quelques pilules miraculeuses.

Vous m'avez bien compris : si vous perdez un être cher (parent, enfant, conjoint, ami), prenez votre calendrier, faites une croix (!) le jour du décès et si, quinze jours plus tard, vous n'êtes pas joyeux, guilleret, voire franchement hilare, courrez chez le psychiatre, car vous débutez un deuil pathologique.

Elisabeth Kubler-Ross, éminente psychiatre humaniste, a décrit dans ses livres les étapes que traverse chaque être humain au moment d'un deuil. Personne ne sait si les experts ont lu ses ouvrages. S'ils l'ont fait, peut-être les rédacteurs du DSM vont-ils concéder après la mort d'un proche une demi-journée de stupeur, quarante huit heures de déni, une journée de colère. Il restera quelques jours pour les larmes, mais elles devront sécher instantanément quand retentira le chant du coq au matin du quinzième jour.

Il est certain que le marché de l'humeur des adultes, des enfants, des vieillards et bientôt peut-être celui des endeuillés est une mine d'or pour quelques uns : en 2010 la vente des antidépresseurs a rapporté quelques milliards de dollars, celle des neuroleptiques également. Ces traitements sont fondamentaux dans certains cas, mais à vouloir psychiatriser des situations non pathologiques, le risque est grand de nuire, d'une part, aux patients qui nécessitent vraiment une prise en charge médicamenteuse lourde et, d'autre part, à ceux qui ont seulement besoin d'un peu d'écoute et d'empathie alors qu'ils traversent une phase de vie difficile, mais normale.

La souffrance psychique est inscrite dans l'histoire de chaque être humain ; il est nécessaire de savoir la respecter, de proposer, le cas échéant, un accompagnement, mais en aucun cas d'avoir le fantasme de toute puissance qui consiste à vouloir la gommer de l'humanité.

S'autoriser à vivre les émotions qui nous traversent, savoir les chevaucher, accepter ce que la colère, la tristesse, la jalousie, la honte nous enseignent sur nous-mêmes : tels sont les outils pour progresser. Le chemin est certes souvent semé d'embûches, mais il ne sert à rien de vouloir prendre des raccourcis qui ne mènent nulle part. Comme le dit Elisabeth Kubler-Ross, "la mort est une question vitale". Vouloir psychiatriser le deuil en inventant le "deuil-TGV", c'est vouloir enlever à l'être humain ce qui fait sa richesse : la possibilité de se confronter à sa propre mort.

Le très sérieux Lancet ne s'y est d'ailleurs pas trompé en intitulant son éditorial du 18 Février dernier "Vivre avec le deuil". On peut lire dans ce très bel article : "médicaliser le deuil et ainsi légitimer l'utilisation en routine d'antidépresseurs n'est pas seulement une caricature dangereuse, c'est aussi une erreur de la pensée".

Je repose mon stylo, mon indignation est intacte. Il y a quelques jours en pensant à un être très cher, mort il y près de 20 ans, une larme m'est venue. Messieurs du DMS V, je ne suis pas déprimé, je l'ai simplement beaucoup aimé.

Références :

  1. Kubler-Ross E. Sur le chagrin et sur le deuil, avec David Kessler, Éditions Jean-Claude Lattès, 2009
  2. Kubler-Ross E .La mort est une question vitale, Éditions Albin Michel, 2010
  3. www.thelancet.com Vol 379 February 18, 2012. http://download.thelancet.com/pdfs/journals/lancet/PIIS0140673612602487.pdf

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LE M'EDITO N°37 - Février 2012

De la difficulté d'être en avance…

Il y a quelques jours en lisant le journal "Le Monde", mon attention a été retenue par un article intitulé "le jeûne, une nouvelle arme de lutte contre le cancer ?". Cet article faisait référence à une étude scientifique très sérieuse publiée dans "Science Translationnal Medicine" au début du mois de Février par une équipe californienne (1).

Il s'agit d'un travail réalisé sur des souris de laboratoire qui montre que la combinaison de cycles courts de jeûne avec la chimiothérapie est plus efficace que la chimiothérapie seule. Valter Longo précise que de multiples périodes de jeûne combinées à la chimiothérapie guérissent 20 % de certains cancers très agressifs chez les souris de laboratoire. Le taux de guérison grimpe à 40 % pour les souris atteintes de ces mêmes cancers quand ils sont moins étendus, alors qu'aucune souris n'a survécu sous traitement chimiothérapique seul.

En lisant cette publication je me suis souvenu du livre "Anticancer" du regretté David Servan-Schreiber dans lequel il évoquait longuement les bienfaits du jeûne (2). Cependant à la parution de ce livre cette idée paraissait à certains un peu farfelue, pour ne pas dire dangereuse.

Par le plus grand des hasards (hasard qui, comme vous le savez et comme l'a dit Albert Einstein, n'existe pas), quelques heures après cette lecture, alors que je me promenais avec deux de mes petits-fils dans un parc de la belle ville de Nancy, je suis tombé nez à nez avec une statue en bronze du bon docteur Emile Coué.

Je suis certain que vous avez entendu parler de la méthode Coué et de la fameuse phrase à se répéter matin et soir comme un mantra : "Tous les jours, à tout point de vue, je vais de mieux en mieux" (3). Emile Coué connut son heure de gloire en Europe et aux États-Unis au début des années 20. Cependant, il tomba dans l'oubli très rapidement après sa mort, ses détracteurs lui reprochant une théorie par trop simpliste.

Affirmer qu'il est possible de modifier en partie l'évolution d'une maladie par "l'autosuggestion consciente" semblait presque une hérésie. Cela paraissait trop facile, trop beau pour être vrai.

En réalité, Emile Coué était simplement en avance sur son temps. Sans doute n'avait-il pas publié du fond de son officine de pharmacie à Troyes des travaux randomisés en double aveugle, mais il s'était rendu compte que la parole délivrée autour du médicament était presqu'aussi importante que le principe actif. Il avait découvert l'effet placebo et les incroyables conséquences du fonctionnement psychique sur le corps.

Cependant si les idées des précurseurs disparaissent et sont raillées, cela ne dure qu'un temps. Les idées d'Emile Coué, jugées trop élémentaires par beaucoup de scientifiques français, ont germées aux Etats-Unis.

Elles nous reviennent maintenant accompagnées de multiples preuves scientifiques indéniables. Il n'est plus question de méthode Coué, mais de psychologie positive. De l'intuition géniale basée sur un excellent sens de l'observation clinique, nous sommes parvenus à un nouveau champ de la psychologie. Pendant de nombreuses années la psychologie a été "explicative", elle devient également maintenant "transformatrice". Elle vise plus à modifier le regard porté sur le monde qu'à l'expliquer. La compréhension est indispensable et la psychanalyse la facilite, mais la modification du regard passe aussi par un entraînement modeste et quotidien et la psychologie positive fait partie de cette pratique tout autant que la relaxation ou la méditation en pleine conscience.

Emile Coué a une statue bien modeste dans le parc Sainte-Marie à Nancy. L'autre jour je lui ai montré un livre de 800 pages intitulé "Traité de psychologie positive" publié sous la direction de Charles Martin-Krumm et Cyril Tarquinio (4). Il m'a semblé très intéressé ; je le comprends, il s'agit de l'ouvrage de référence indispensable sur le sujet.

Pendant que je feuilletais les pages devant lui, j'ai cru le voir sourire et l'entendre dire : "je parie que quelques courtes périodes de jeûne en plus de l'activité physique, d'une alimentation saine, et de la pensée positive pourraient diminuer le risque cardiovasculaire".

Je l'ai regardé avec tendresse : "allons, Emile un peu de sérieux, encore une de tes intuitions, tu es encore en avance, tu oublies que nous sommes maintenant au siècle de la médecine fondée sur les preuves !!!".

Références :

  1. Changhan Lee, Valter D. Longo. Fasting Cycles Retard Growth of Tumors and Sensitize a Range of Cancer Cell Types to Chemotherapy. Science Translational Medicine . February 8 2012.
  2. Servan-Schreiber D. Anticancer : prévenir et lutter grâce à nos défenses naturelles. Ed Laffont. Paris. 2007
  3. Coué Emile. La maîtrise de soi-même par l'autosuggestion consciente. Poche - 2007.
  4. Martin-Krumm C, Tarquinio C. Traité de psychologie positive. Ed De Boeck Bruxelles. 2011.

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°36 - Janvier 2012

Que du bonheur…

L'année 2012 vient de débuter et j'entame la rédaction du trente-sixième numéro du MEDITO. Je constate que ces trois dernières années, je ne vous ai pas souhaité une bonne année. Peut-être est-ce une vieille réminiscence de mon enfance. Je trouvais à cette époque qu'il y avait trop de bises à faire à quelques vieilles bajoues piquantes ou trop parfumées. Moi, je préférais la douceur naturelle des joues de ma cousine…

Janvier, mois des vœux qu'il est possible de présenter jusqu'au 31. Dés le premier Février on nous conseille de passer à la réalité, car chacun sait que, par définition les vœux, c'est ce qui est souhaité et se réalise rarement. Malgré tout je rêve d'un monde où il soit possible que chacun œuvre à sa juste mesure personnelle pour le bonheur, la paix, la sérénité de tous sans passer pour autant pour un doux rêveur ou un utopiste attardé.

Ce mois-ci je vais vous faire un petit cadeau mais auparavant voici quelques nouvelles scientifiques qui nous confortent dans notre choix : proposer une démarche de prise en charge du stress psychosocial qui ne soit pas exclusivement médicamenteuse, mais qui au contraire favorise un travail personnel, une réflexion, une chemin naturel basé sur l'activité physique, la relaxation, la méditation.

En 2008 la Caisse Nationale d'Assurances Maladie avait montré que chaque Français consomme tous les ans un mois de traitement antidépresseur. Un récent rapport de l'AFSSAPS (Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé) vient de rappeler que la France demeure la championne d'Europe de la consommation de benzodiazépines (1). Ces molécules sont utilisées comme anxiolytiques ou hypnotiques (somnifères). En 2010 nous en avons consommé 134 millions de boites ou si vous préférez le dire autrement : chaque français a été sous anxiolytiques pendant deux mois. Ce rapport nous apprend que ce sont surtout les femmes et les sujets âgés qui sont de gros consommateurs (1 femme sur 3 après 70 ans).

Notre propos n'est ni de jeter les médicaments à la poubelle ni de vouloir être suspicieux face à leur efficacité. Rappelons cependant qu'à notre connaissance aucun travail n'a été fait sur l'effet des anxiolytiques en cardiologie. En revanche plusieurs publications récentes nous apprennent que la prise de certaines molécules à visée psychiatrique est un indice de mauvais pronostic au moment d'un infarctus (2) et augmente le risque de mort subite, en particulier pour les sujets âgés (3). Ces médicaments sont utiles et même indispensables à certains patients. Leur prescription doit cependant respecter des règles précises d'indication et de surveillance psychiatrique et cardiologique comme le souhaite Josep Brugada dans un éditorial récent paru dans European Heart Journal (4).

Et maintenant le cadeau… Je vous le donne avec d'autant plus de plaisir qu'il me vient d'un patient. Manfred (quel magnifique prénom) me l'a envoyé comme cadeau de nouvelle année. Manfred a tout compris de la prévention secondaire après infarctus : la diététique n'a plus de secret pour lui, il pratique le vélo comme un vrai champion, mais sans esprit de compétition et surtout il respire la joie de vivre. Avec lui chaque consultation est un véritable échange : chacun donne et chacun reçoit. Une vraie rencontre.

Merci Manfred pour ce cadeau que je partage avec un immense plaisir. Il n'y a aucune limitation dans la posologie, pas de contre indication, aucune effet secondaire à craindre. Bonne année à toutes et à tous.

Pour le cadeau de Manfred cliquez ici et profitez de ce présent.

Références :

  1. AFSSAPS. Etat des lieux de la consommation des benzodiazépines en France - Rapport d'expertise (16/01/2012).
  2. Honkola J, Hookana E, Malinen S, Kaikkonen KS, Juhani Junttila M, Isohanni M, Kortelainen ML, Huikuri HV. Psychotropic medications and the risk of sudden cardiac death during an acute coronary event.Eur Heart J. 2011 Sep 14.
  3. Ray WA, Chung CP, Murray KT, Hall K, Stein CM. Atypical antipsychotic drugs and the risk of sudden cardiac death. N Engl J Med 2009;360:225–235.
  4. Brugada J.Psychosis, depression, and high risk for sudden cardiac death: time for co-operation between psychiatrists and cardiologists. Eur Heart J. 2011 Oct 31.

Prenez soin de vous…

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LE M'EDITO N°35 - Décembre 2011

Un tabou dont il faut oser parler…

Bientôt Noël et les fêtes de fin d'année. Toujours pas de neige, mais les guirlandes dégoulinent du ciel. Je n'oserai pas vous parler de la soucoupe volante multicolore qui a atterri devant notre immeuble tant elle semble ridicule. Il paraît que c'est une décoration lumineuse ; elle me semble surtout destinée à baliser le parcours vers le nouveau centre commercial : Noël, fête de la consommation. Hier j'ai fait une expérience singulière, je me suis rendu dans une grande surface de jouets pour enfants. J'y ai vu les rayons débordants de cadeaux, les parents et grands-parents cherchant le dernier article à la mode, les vendeuses fatiguées par le brouhaha impatient des enfants. Je n'ai pas trouvé ce que je cherchais et en sortant sur le parking j'ai croisé un père excédé par son petit garçon. Celui-ci n'avait sans doute pas obtenu le joujou de ses rêves et il manifestait bruyamment son mécontentement. Le père en colère, à court de mots, a frappé son fils d'une façon qui m'a fait frémir. Fallait-il que j'intervienne face à cette violence banale ?

Pourquoi évoquer cela aujourd'hui ? Parce que je viens de terminer le dernier livre (1) de Boris Cyrulnik : "Quand un enfant se donne la mort". Question tabou entre toutes : pourquoi un enfant de moins de douze ans se donne-t-il la mort ? Cette interrogation est tellement insupportable pour les parents, pour la famille, pour la société que pendant longtemps elle a été occultée.

Cette réalité est cependant loin d'être exceptionnelle : en France elle concerne 0,4 enfant pour mille. 10% des enfants scolarisés disent avoir pensé au suicide. Les statistiques sont cependant très délicates à obtenir et sans doute un certain nombre d'accidents sont-ils en réalité des suicides. C'est environ à partir de huit ans environ que l'enfant comprend que la mort est irréversible et même quand il est plus grand son discours est souvent ambigu : "Je me suiciderais bien, mais après j'ai peur de le regretter", "Je voulais que ma vie change, pas qu'elle s'arrête". Le jeune enfant agit de façon impulsive et rien dans les minutes qui précédent ne laissait supposer un passage à l'acte. Ceci est une source d'interrogations sans fin pour les parents et l'entourage : "Mais … pourquoi ???".

Boris Cyrulnik parle de crise suicidaire : "Il est nécessaire de sortir de la vision du bouc émissaire : c'est la faute des parents, de la société, du professeur… en réalité c'est une constellation de déterminants qui pousse l'enfant à l'acte". La génétique joue bien sûr un rôle, il existe des familles de suicidaires et certains enfants sont plus fragiles car ils sont génétiquement de "petits transporteurs" de sérotonine, ce neurotransmetteur qui joue un rôle fondamental dans l'humeur. Cela n'est cependant pas une fatalité et il faut le dire aux familles : un "petit transporteur" sécurisé par son entourage n'a pas plus de risque de suicide qu'un "gros transporteur". Le stress maternel durant la grossesse et au cours du développement précoce de l'enfant (isolement affectif, violence entre parents ou dans la fratrie) peut entraîner une hypersensibilité émotionnelle. Le développement du cerveau frontal est alors moins riche en connexions neuronales et cela provoque une moindre régulation des émotions. Le mode de vie que nous avons adopté joue également un rôle : nous privilégions le développement corporel et intellectuel au détriment de la construction d'un monde sécurisant pour l'enfant. 30% des enfants sont insécures, ils souffrent moins matériellement, mais pensent plus à la mort. "La dilution du lien est plus souvent provoquée par nos progrès techniques que par une défaillance parentale… les enfants, gardés par un réfrigérateur et la télévision sont reliées au monde affectif grâce à un téléphone portable".

Devant une question aussi douloureuse et si complexe les propositions de Boris Cyrulnik ne sont ni simplistes ni stigmatisantes. Il n'y a pas un responsable et nous avons tous la possibilité d'un rôle de prévention.

Oser en parler et dire qu'il n'y a là aucune fatalité ; favoriser les actions dans le domaine de la protection de la petite enfance ; former les soignants, les enseignants et chacun d'entre nous à repérer les enfants en souffrance ; privilégier le développement sécure des enfants et pour cela leur créer une niche affective vraie et vaste ; créer du lien avec eux de multiples façons, les encourager à exprimer leurs émotions, les aider à prendre des responsabilités ; lutter contre les ruptures affectives ; créer de la solidarité autour et avec eux ; structurer le quotidien par des rituels qui donnent sens à l'existence ; enfin inciter les enfants à pratiquer une activité sportive.

"Il n'y a aucune fatalité au passage à l'acte brutal d'un enfant : c'est la création d'un lien qui permet de contrôler l'impulsion". Alors que nous préparons Noël rappelons-nous qu'un cadeau n'a de sens que s'il est porteur de lien : "Ce qui tisse le mieux l'attachement d'un enfant, c'est l'apaisement de ses angoisses et non la satisfaction de ses besoins".

Heureusement tous les enfants insécures ne se suicident pas. N'oublions cependant jamais que la construction cérébrale d'un enfant détermine sa relation ultérieure au monde qui l'entoure et que l'hypersensibilité émotionnelle au stress quotidien est aussi un facteur de risque cardiaque.

Joyeux Noël à tous entourés de tous les enfants du monde qui sont les graines de la vie…

Références :

  1. Quand un enfant se donne "la mort". Boris Cyrulnik. Editions Odile Jacob 2011

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LE M'EDITO N°34 - Novembre 2011

La musique adoucit les mœurs et bien plus encore…

Qui a inventé la musique ? Bien malin celui qui est capable de répondre à cette question tant la musique semble faire partie de la nature humaine. Est-ce un mélomane néanderthalien cherchant à imiter le cri des bêtes, le champ des oiseaux ou le bruit du vent dans les arbres? Est-ce un lointain ancêtre de Buddy Rich ou de Kenny Clarke se mettant à frapper en rythme un bout de bois sur une pierre ? Est-ce une maman découvrant avec émerveillement que les vocalises émises par son larynx pouvaient calmer les cris de son petit ? Personne ne le sait. Peut-être la musique est-elle plus ancienne que l'être humain.

Imaginons un instant un monde sans musique. Cela est parfaitement inconcevable. La privation sensorielle en particulier de son est même une des tortures les plus efficaces. Très tôt l'homme a cherché à produire des sons harmonieux pour exprimer ses sentiments et en susciter chez les autres. La musique est intimement liée à nos émotions et à notre corporalité. Il suffit pour s'en convaincre de voir le nombre de joggeurs qui courent le casque sur les oreilles, de percevoir la sensualité érotique d'un couple dansant le tango ou encore de frémir devant l'efficacité guerrière de la musique militaire.

La musique militaire est-elle de la musique ? On peut en douter quand on se souvient qu'Aristote disait il y a plus de deux mille ans que la musique adoucit les mœurs. Depuis, de nombreux travaux de recherche, parfois extrêmement surprenants, ont montré qu'elle fait bien plus que cela.

Il est actuellement prouvé que certains types de musique ont un effet relaxant et diminuent l'anxiété. La musique est ainsi employée par de nombreuses équipes (1) pour diminuer le stress lié à une intervention ou en postopératoire comme un adjuvant antalgique. La musique agit sur notre système parasympathique (2), elle permet de diminuer la sécrétion d'hormones (adrénaline et corticoïdes) et les réactions inflammatoires liées au stress (baisse de la production de cytokines). Des chercheurs ont étudié le fonctionnement cérébral en IRM fonctionnelle durant l'écoute de partitions musicales : le cerveau réagit, en particulier dans les zones liées au plaisir, avec autant de force qu'au cours d'une relation sexuelle, qu'en mangeant un met délicieux ou sous l'effet d'une drogue (3). La relation avec les comportements de survie les plus primitifs (sexe, nourriture, plaisir) est surprenante et confirme que la musique est peut-être indispensable à l'être humain et qu'en tout cas, elle participe à son bien-être fondamental.

Les travaux sur l'influence de la musique en cardiologie sont déjà très anciens. En 1918, Hyde et Scalapino affirment que la musique en mode mineur fait baisser la tension et modifie la fréquence cardiaque. Plus récemment Bernardi de l'université de Pavie (4) montre que selon le tempo, les réactions cardiovasculaires sont très variées et qu'une musique lente provoque le même effet que la méditation en augmentant le tonus parasympathique, ce qui permet de ralentir la fréquence cardiaque, de baisser la tension artérielle et d'améliorer la variabilité sinusale. Ce chercheur confirme par ailleurs ce que connaissent bien les grands chefs d'orchestre : l'effet physique et psychique déclenché par la musique réside dans la "qualité" du silence entre les notes.

Toutes les musiques ne semblent pas avoir un effet positif sur le système cardiovasculaire. Le Hard rock et autres Heavy métal et Techno, un peu comme les musiques militaires, pourraient être néfastes. Mieux vaut pour se relaxer écouter de la musique classique ou de la musique dédiée à la méditation.

Plus surprenant encore : des biologistes se sont penchés sur l'effet de la musique ou plus exactement de certaines vibrations (la musique étant un phénomène vibratoire) sur la modification génétique (5). Même si certains travaux sont contestés, il apparaitrait que certaines parties des gènes en particulier ceux des plantes puissent être renforcées ou altérées par les sons (modification épigénétique). Imaginez, la thérapie génique par la musique !

Au terme de ce court voyage en musicothérapie, écoutons la musique que nous aimons, celle qui relaxe, celle qui apaise ; chantons sous la douche, dans la voiture, dans le salon. Il n'y a aucun effet secondaire néfaste à ce traitement naturel et qui sait peut-être aurons nous la surprise de voir nos plantes vertes danser de plaisir.

Références :

  1. Wang SM, Kulkarni L, Dolev J, Kain ZN. Music and preoperative anxiety: a randomized, controlled study. Anesth Analg. 2002 Jun;94(6):1489-94.
  2. Ellis RJ, Thayer JF. Music and Autonomic Nervous System (Dys)function. Music Percept. 2010 Apr;27(4):317-326.
  3. Blood AJ, Zatorre RJ. Intensely pleasurable responses to music correlate with activity in brain regions implicated in reward and emotion. Proc Natl Acad Sci U S A. 2001 Sep 25;98(20):11818-23.
  4. Bernardi L, Porta C, Sleight P. Cardiovascular, cerebrovascular, and respiratory changes induced by different types of music in musicians and non-musicians: the importance of silence. Heart. 2006 Apr;92(4):445-52.
  5. http://www.genodics.net/JMSternhei/bekkoame/InterNonlocF.html. Joël Sternheimer, "Régulation épigénétique de la biosynthèse des protéines par résonance d'échelle", exposé à l'Académie des Sciences de Tokyo-Kanagawa

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LE M'EDITO N°33 - Octobre 2011

Il y a encore du pain sur la planche…

Le hasard, qui n'existe pas comme disait le génial ébouriffé Albert Einstein, fait parfois se croiser dans les journaux des nouvelles qui méritent d'être confrontées les unes aux autres un peu à la façon dont le malicieux dessinateur Plantu télescope deux évènements dans ses caricatures du journal "le Monde".

Je vous livre ainsi quelques nouvelles fraiches à mettre en perspective en ce début de mois d'octobre qui sent déjà l'automne à plein nez.

Info numéro 1 : le réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles (RNV3P) a publié son rapport sur les données de la santé au travail recueillies pendant dix ans par les centres de consultation des centres hospitalo-universitaires et de médecine du travail. Les résultats sont extrêmement inquiétants. Les troubles mentaux encore rares il y a dix ans représentent maintenant 22% des motifs de consultation. Les salariées de la finance ont un risque psychique multiplié par neuf. La crise ne fait pas que des dégâts financiers.

Info numéro 2 : la Fédération Française de Cardiologie vient d'effectuer un sondage auprès de 401 médecins généralistes afin de définir leur approche de la prévention cardiaque. Les résultats montrent que 98% des médecins interrogés sont très attentifs aux signes avant-coureurs de la maladie coronaire. Ils privilégient des actions sur certains facteurs de risque tels le tabac, le diabète, le cholestérol. En revanche la plupart des facteurs comportementaux ne semblent pas être une priorité pour eux ; ainsi seuls 14% évoquent l'hygiène alimentaire, 11% la sédentarité et le stress arrive en lanterne rouge des préoccupations des médecins généralistes : seuls 3% le prennent en considération.

Info numéro 3 : Une enquête de la Caisse Nationale d'Assurance-Maladie nous apprend que les Français sont les champions de l'ordonnance : 90% des consultations se terminent par une prescription médicamenteuse. Les molécules les plus demandées par les patients sont les antalgiques pour 47%, les somnifères pour 46% et les anxiolytiques pour 42%.

Additionnons maintenant ces trois informations dans la vraie vie : je suis cadre bancaire et ma hiérarchie me harcèle ; le risque que je développe un burn-out est donc très important. Cette situation psychique multiplie mon risque d'infarctus par 10 à un an. Si j'en parle à un médecin, j'ai 3% de chances qu'il considère ma situation psychique comme à haut potentiel coronarien et en revanche une chance sur deux de sortir de la consultation avec une ordonnance de psychotropes.

Les médecins et les patients ont certainement besoin d'informations sur l'importance des facteurs psychiques en cardiologie et sur les méthodes de prise en charge non médicamenteuse, mais avant de jeter la pierre aux uns et aux autres peut-être serait-il intéressant de clamer haut et fort la réalité du monde du travail : la politique de la rentabilité envers et contre tout et son corollaire, le harcèlement sous toutes ses formes, sont contre-productifs. Vous en voulez la preuve ?

Info numéro 4 : deux chercheuses suédoises ont eu l'idée de séparer les salariés d'un même employeur en trois groupes identiques. Le premier ne changeait rien aux consignes de travail antérieures, le second avait droit à une demi journée de repos supplémentaire, le troisième devait occuper ce temps de loisir additionnel à la pratique d'une activité physique. Que croyez-vous qu'il arriva ? Ceux qui travaillaient moins en faisant du sport se sentaient mieux physiquement et mentalement et étaient plus productifs (plus grande énergie au travail et moins de jours d'absence).

Mieux prendre en charge le stress quand il existe et surtout ne pas en générer inutilement. Il y a encore du pain sur la planche pour les employeurs, les patients, les médecins… et Meditas-Cardio !

Références :

  1. www.afsset.fr
  2. www.fedecardio.com - Enquête IFOP-FFC réalisée du 19 au 23 Septembre 2011
  3. Ulrica von Thiele Schwarz Ulrica, Henna Hasson. Journal of Occupational and Environmental Medicine. 2011, 53(8) :838–844

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LE M'EDITO N°32 - Septembre 2011

De la tête aux pieds…

En partant en vacances, je m'étais promis d'écrire pour la rentrée de septembre un petit mot pour vous parler des bienfaits de la marche.

Après cette période de relâche estivale le train de la vie a repris son allure de TGV, l'été indien nous incite à poursuivre un peu le farniente. C'est donc avec un peu de retard que je me décide enfin à le faire.

Ma dernière petite fille va bientôt avoir un an et après avoir goûté aux délices de la reptation, son souhait le plus cher est de se mettre maintenant debout et de partir sur ses deux jambes à la découverte du monde. Merveille du développement cérébral qui nous fait passer en quelques mois de la dépendance gesticulante à l'autonomie du marcheur capable, s'il le souhaite, de faire le tour du monde sur ses deux pieds. La marche est un cadeau pour l'homme : elle permet une juste relation entre l'espace et le temps. Marcher, c'est visiter le monde à la vitesse de l'homme, c'est rythmer le temps à la mesure de nos pieds. La marche, mouvement pendulaire parfait, procure un bien être physique, mais c'est aussi une véritable psychothérapie.

L'être humain est une construction rythmique, depuis le vingtième jour de sa vie intra-utérine, son cœur marque le tempo. La marche nous aide à prendre conscience de cette pulsation primitive inscrite au plus profond de nos cellules.

Faites l'expérience de marcher suffisamment longtemps pour que le balancement de vos jambes vous amène progressivement à l'essentiel. La marche, loin d'être une recherche de performance sportive, nous invite alors à redécouvrir la lenteur, le plaisir de la solitude, du silence et de la rencontre avec nous-mêmes. Parfois au contraire, elle permet l'échange avec d'autres déambulateurs terrestres et dans ces conversations de chemin faisant, les mots se font plus rares, plus vrais, plus justes.

La marche est une méditation qui nous amène à voyager au centre de nous-mêmes. Elle est capable de modifier notre corps, mais aussi notre esprit en permettant la création de nouvelles connexions cérébrales. De nombreux cerveaux brillants ont utilisé la marche comme un accélérateur de leur réflexion philosophique ou scientifique. Aristote, chef de file des philosophes péripatéticiens, enseignait en se promenant ; Jean-Jacques Rousseaux écrivait en marchant ; Rimbaud a traversé l'Europe à pied en poétisant et Nietzsche n'avait aucun doute sur les bienfaits du nomadisme pédestre "Seules les pensées qui nous viennent en marchant ont de la valeur".

Il ne fait aucun doute que l'activité physique est indispensable pour être en bonne santé. Notre corps ressemble à une montre suisse des années 70 qu'il fallait secouer pour qu'elle fonctionne correctement. La marche, activité humaine par excellence, nous permet de coupler aux bénéfices physiques d'importants bienfaits psychiques. Nul besoin de matériel coûteux et sophistiqué, une bonne paire de chaussures suffit. Certains proposent même de marcher sans chaussures, quelque soit le revêtement… Pour l'instant je n'ai pas essayé. Ce sont bien entendu des marcheurs d'outre-Atlantique qui ont réinventé cette pratique ancestrale. Ils appellent cela le barefooting. Pour ma part, je préfère l'humilité du va nu-pieds.

Prenez soin de vous de la tête aux pieds…

Quelques livres de marcheurs :

  1. David Le Breton. Eloge de la marche, Métailié Essais
  2. Frédéric Gros. Marcher, une philosophie, Champs Essais.
  3. Michel Jourdan, Jacques Vigne. Marcher, méditer, Ed Albin Michel.
  4. Christophe Lamoure. Petite philosophie du marcheur, Ed Milan
  5. Pierre Sansot. Du bon usage de la lenteur. Poche bibliothèque.

Prenez soin de vous…

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LE M'EDITO N°31 - Juillet - Août 2011

Dis-moi où tu habites...

Le site Meditas Cardio a pour vocation de vous informer sur l'importance des facteurs psychosociaux en cardiologie. Le stress, l'anxiété, la dépression augmentent le risque cardiovasculaire et aggravent le pronostic des patients déjà atteints par ce type de pathologie.

Avoir une alimentation saine, pratiquer une activité physique régulière sans avoir obligatoirement un esprit de compétition, savoir se relaxer, méditer, s'accorder du temps personnel, autant de conseils qui relèvent du bon sens, mais qui permettent de diminuer le risque de maladies de façon très significative.

Cependant, dans le mot psychosocial, il y a social. Le risque cardiovasculaire est également influencé par de multiples facteurs sociaux : le niveau socio-économique, le soutien social c'est-à-dire la présence des amis, de la famille, du conjoint ou de la compagne. Même le sentiment religieux ou spirituel pourrait protéger nos artères.

Soyons cependant lucides : il est des chiffres qui dépendent de facteurs complexes et des situations plus faciles à changer que d'autres. Un livre passionnant écrit par Emmanuel Vigneron est paru il y a quelques semaines. Ce chercheur, enseignant à Montpellier est spécialisé dans la géographie de la santé. Ce qu'il nous révèle est très intéressant : la santé est certes influencée par nos comportements, par les soins que nous recevons, mais savez-vous qu'elle est aussi dépendante de l'endroit où nous vivons ? Ainsi, il est étrange de suivre le risque de mortalité le long de la ligne B du RER parisien. Selon que vous habitez à Gif-sur-Yvette, à proximité de la station Port Royal ou à la Courneuve, le taux de mortalité à âge équivalent est extrêmement variable. En un quart d'heure de métro la mortalité augmente de plus de 80%. Bien entendu, il ne suffit pas de déménager pour transformer radicalement cette situation de santé.

A vrai dire l'espoir de vie dépend de multiples facteurs allant du nombre de médecins à proximité de votre domicile, à votre niveau d'éducation ou votre niveau de vie. Ces constatations sont surtout vraies pour les maladies cardiovasculaires et les cancers digestifs. Tenter de modifier de telles statistiques nécessite bien entendu une participation des patients, une meilleure prise en charge de la part des soignants, mais aussi une politique de la santé publique et de l'éducation. Cela réclame de savoir privilégier le long terme plutôt qu'un résultat immédiat. Cela relève en partie d'un choix de société.

De plus en plus d'articles d'épidémiologie montrent qu'il existe une relation entre le niveau d'intelligence (le QI) et la santé. Certains auteurs montrent ainsi que le QI serait un facteur de risque cardiaque aussi puissant que le tabac. Plutôt que de polémiquer sur de tels résultats, il convient de lire attentivement ces publications et de constater que derrière ces chiffres, il existe une réalité psychosociale très complexe et que l'effet du QI disparaît quand on intègre dans ces travaux le niveau de revenu et surtout le niveau éducatif.

Il y a 10 ans déjà Eric Brunner dans un superbe éditorial résumait en quelques mots le meilleur traitement du risque social : éducation, éducation, éducation...

Références :

  1. E. Vigneron. Les inégalités de santé dans les territoires français. Ed. Elsevier Masson 2011.Paris
  2. Calvin CM, Deary IJ, Fenton C, Roberts BA, Der G, Leckenby N, Batty GD. Intelligence in youth and all-cause-mortality: systematic review with meta-analysis. Int J Epidemiol. 2010.(Abstract)
  3. Brunner E. Commentary: éducation, éducation, éducation. Int J Epidemiol. 2001; 30(5):1126-8.

Prenez soin de vous…

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LE M'EDITO N°30 - Juin 2011

David contre Goliath…

Personne n'ignore cette expression employée pour qualifier un combat entre des adversaires de forces inégales, mais connaissez-vous vraiment l'histoire édifiante du combat entre David et Goliath. On en trouve le récit précis au chapitre premier du Livre de Samuel dans la Bible.

Les Philistins et le peuple d'Israël étaient en guerre. Le champion des Philistins se nommait Goliath : il mesurait près de trois mètres de haut, portait une armure en bronze lourde de 50 kilos et terrorisait tous ses adversaires avec son épée de plus de 6 kilos. Dans la vallée d'Elah où les deux armées se faisaient face, il narguait ses ennemis tous les matins, et ceci pendant 40 jours, les mettant au défi de trouver un combattant parmi eux capable de lutter avec lui. Personne n'osait lui répondre et tous tremblaient d'effroi.

Le roi des juifs promit alors la main de sa fille à celui qui donnerait la victoire à son peuple. L'espoir était bien mince. Un jeune berger du nom de David se proposa. Manifestement ses chances d'emporter un succès étaient infimes. Il refusa toute armure et tout glaive et partit au combat armé de son enthousiasme, d'une petite fronde et de quelques cailloux ronds.

Arrivé à bonne distance de son ennemi, David fit tournoyer sa fronde et projeta un caillou entre les deux yeux de Goliath qui mourut sur le champ. Les Philistins s'enfuirent, la victoire était acquise contre toute attente.

Pourquoi vous raconter cette histoire en ce mois de juin ? Tout simplement parce que c'est cette histoire qui m'est immédiatement venue en tête en prenant connaissance de nouvelles récentes de David Servan-Schreiber. Nous savions qu'il luttait à nouveau contre la récidive d'une tumeur cérébrale. Il ne l'avait jamais caché. Avec courage il a continué à écrire pour transmettre ses messages et il vient de publier (1) un nouvel ouvrage "On peut se dire au revoir plusieurs fois" dans lequel il nous donne à nouveau une leçon de vie, de courage, d'humour et de lucidité. David Servan-Schreiber n'est pas seulement un auteur à succès (2,3), parfois injustement décrié, il est aussi surtout scientifique de haut niveau.

Nous pensons comme lui que le soin doit reposer sur une prise en charge globale à la fois physique, psychologique et sociale. Cette médecine intégrative a recours aux outils les plus sophistiqués de la technologie médicale tout autant qu'aux possibilités thérapeutiques non médicamenteuses qui ont fait la preuve de leur efficacité dans de nombreuses études.

Je ne résiste pas au plaisir de vous citer un exemple de ce merveilleux petit livre de 160 pages que je vous recommande vivement : "En phase aiguë d'un infarctus, on ne met pas le patient sur un vélo et on ne lui fait pas faire de la méditation, on lui pose un stent. En revanche, s'il fait du vélo et pratique des méthodes de relaxation en complément de son traitement médical préventif, il diminuera de façon très significative son risque de récidive d'accident cardiaque".

Pendant que David lutte contre Goliath, le symbole de ce qu'il prône depuis plusieurs années vient de faire une entrée officielle assez fracassante dans l'univers médical français. La Haute Autorité de Santé vient en effet de publier un rapport d'orientation (4) sur le "Développement de la prescription de thérapeutiques non médicamenteuses validées".

Que de chemin parcouru depuis quelques années. Il y a dix ans parler de médecine non médicamenteuse ressemblait au combat entre David et Goliath ; aujourd'hui il est admis qu'une activité physique régulière, une alimentation saine et une meilleure gestion psychologique sont extrêmement bénéfiques sur la santé et améliorent le pronostic de nombreuses maladies chroniques. La conclusion de ce rapport auquel Meditas Cardio a participé insiste sur le fait qu'il est indispensable de favoriser l'information sur ces méthodes non médicamenteuses auprès des patients et du corps médical. C'est ce que nous tentons de faire ici même.

David, nul ne sait si vous gagnerez votre bataille contre ce terrible Goliath. Nous vous le souhaitons. Le combat que vous avez entamé il y a plus de vingt ans pour développer une vision holistique de la médecine est d'ores et déjà gagné. Merci pour tout et prenez soin de vous.

Références :

  1. David Servan-Schreiber : On peut se dire au revoir plusieurs fois. Ed Robert Laffont. 2011
  2. David Servan-Schreiber : Guérir le stress, l'anxiété et la dépression sans médicaments ni psychanalyse. Ed robert Laffont. 2003
  3. David Servan-Schreiber : Anticancer : Prévenir et lutter grâce à nos défenses naturelles. Ed Robert Laffont.2007
  4. http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1059795/developpement-de-la-prescription-de-therapeutiques-non-medicamenteuses-validees

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°29 - Mai 2011

Les cordonniers sont mal chaussés…

Chaque mois dans ce « M'édito » nous tentons de donner avec un peu d'humour des informations scientifiques assaisonnées de quelques petits conseils de gestion du stress.

Il pourrait sembler évident que ce site soit en priorité destiné aux patients qui souffrent de stress psychosocial et souhaitent diminuer cette part du risque cardiovasculaire.

N'est-il pas urgent cependant de s'occuper également du stress des soignants ? On a en effet déjà vu de très médiocres joueurs de football devenir de fabuleux entraîneurs. Il semble en revanche délicat qu'un soignant prenne en charge la souffrance psychique d'un patient en étant lui-même en difficulté.

Depuis de nombreuses années les associations et les syndicats médicaux, en particulier de médecins généralistes, témoignent du nombre des burn-out, des dépressions, et des suicides chez les professionnels de santé. Les sujets à plus haut risque sont les praticiens jeunes, investis dans un idéal de soin, en exercice solitaire, en surcharge de travail et s'accordant peu de loisirs (1,2).

Les Anglo-Saxons et les Québécois ont depuis longtemps alerté sur le risque de burn-out des étudiants en médecine, mais en France jusqu'à présent, on savait peu de choses sur le stress des jeunes internes travaillant en milieu hospitalier. Or ce sont les médecins de demain.

Une étude récente (3) s'est intéressée au burn-out des internes des centres hospitalo-universitaires qui se destinent à la cancérologie et à l'hématologie. Il s'agit certes de spécialités difficiles, mais il est cependant probable que les résultats extrêmement inquiétants soient extrapolables aux autres praticiens-juniors. Sur un échantillon de 340 internes, 26% sont en état d'épuisement émotionnel, 35% dépersonnalisent les patients, c'est-à-dire qu'ils ne les considèrent plus comme des êtres humains et 44% présentent un tableau de burn-out. Pour pallier cette souffrance, qui n'est pas prise en charge par leur institution, ces futurs médecins avouent se refugier fréquemment dans la consommation d'alcool qui est franchement excessive pour 8% d'entre eux. Plus alarmant encore, un interne sur quatre consomme des psychotropes : anxiolytiques et antidépresseurs.

Les motifs de souffrance sont variés : charge émotionnelle, surcharge de travail, pression administrative, questions existentielles (peur de la mort ou de l'erreur médicale), demandes des patients et des familles et enfin statut du soignant (peur de l'avenir, sensation d'isolement, poids de la hiérarchie).

Ces jeunes internes souhaitent la mise en place de séances théoriques et pratiques de gestion du stress, de groupes de parole et d'entraide et demandent l'aide de leurs aînés. Ce type de programme (4) a déjà vu le jour à l'université de Laval au Québec.

Il est grand temps que les facultés de médecine françaises et les directeurs d'hôpitaux aient de telles initiatives. Ce serait une « faute inexcusable » de ne pas le faire. Sinon peut-être verrons nous dans quelques temps les patients apprendre à leur médecin comment mieux gérer le stress et les clients enseigner au cordonnier comment ressemeler ses chaussures… mais, au fait, répare-t-on encore aujourd'hui les souliers ?

Références :

  1. Center C, Davis M, Detre T, Ford DE, Hansbrough W, Hendin H, et al. Confronting depression and suicide in physicians : a consensus statement. JAMA. 2003;289:3161-6.
  2. Delbrouck Michel. Le burn-out du soignant . Ed de Boeck. Bruxelles. 2003
  3. Blanchard P, Truchot D, Albiges-Sauvin L, Dewas S, Pointreau. Prevalence and causes of burnout amongst oncology residents : a comprehensive nationwide cross-sectional study. Eur J Cancer. 2010 Oct;46(15):2708-15.
  4. Ratte C, Verret S. Programme de prévention des effets secondaires de la formation médicale. Annales CRMCC,1995 ;1 :21-24

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°28 - Avril 2011

La bourse : ni trop ni trop peu

L'être humain, comme toute espèce vivante de ce monde, est soumis à la loi du juste milieu. Ainsi les plans de tomates de mon potager ou les pivoines de mon jardin peuvent-ils aussi bien mourir par manque d'eau que d'un arrosage excessif.

Il en est de même pour la quantité de stress tolérée par notre organisme. Trop peu de stimulation conduit à un désintérêt pour le monde qui peut mener à la mort comme l'a montré le psychiatre anglais John Bowlby auprès des enfants abandonnés dans les orphelinats à la fin de la dernière guerre mondiale. A contrario un excès de stress est tout aussi mortifère car il peut aboutir par exemple au Karoschi décrit par les japonais et défini comme une mort subite survenue après un excès de travail de plus de vingt-quatre heures consécutives ou de plus de seize heures quotidiennes durant une semaine.

Des auteurs chinois, certainement pétris de Confucianisme, viennent de publier dans l'European Heart Journal de ce mois une étude (1) au premier abord surprenante, mais en fait tout à fait prévisible pour ceux qui connaissent un peu les effets du stress en cardiologie. Wenjuan Ma et ses collaborateurs ont en effet étudié les effets des cours de la bourse chinoise sur la mortalité coronarienne. Ils ont ainsi montré que le risque d'infarctus était corrélé aux fluctuations boursières, qu'une baisse brutale mais aussi une forte hausse étaient néfastes pour le cœur. La vision du spectre de la faillite ou l'exaltation d'une richesse brutale sont générateurs d'infarctus et les boursicoteurs de tout poil devraient s'en souvenir.

Une autre publication récente d'Issa Dahabreh (2) dans le Journal of the American Medical Association a retenu toute notre attention ce mois-ci, même si elle n'a aucun lien avec ce qui vient d'être dit (encore que…). Cette équipe s'est intéressée au risque d'infarctus provoqué par l'activité physique et l'activité sexuelle. Leur conclusion est formelle : il est nécessaire de s'entraîner régulièrement. Les auteurs ne s'aventurent cependant pas à donner un chiffre précis sur le nombre d'entraînements sexuels souhaitables et citent juste le chiffre pudique de trois activités physiques hebdomadaires sans préciser s'il s'agit de footing ou de gros câlins.

Tout étant question de juste mesure, ou de courbe en U comme disent les statisticiens, nous attendons avec impatience la publication des auteurs qui déterminera avec précision le nombre minimal et maximal de rapports sexuels quotidiens, hebdomadaires, mensuels ou annuels (à cocher selon votre âge) à avoir pour ne pas mettre notre cœur en danger.

En attendant je vous conseille simplement à la vue de ces deux publications de ne pas lire les cours de la bourse en faisant l'amour.

Références :

  1. Ma W, Chen H, Jiang L, Song G, Kan H. Stock volatility as a risk factor for coronary heart disease death. Eur Heart J. 2011 Apr;32(8):1006-11
  2. Issa J. Dahabreh, Jessica K. Paulus.Association of Episodic Physical and Sexual Activity With Triggering of Acute Cardiac Events: Systematic Review and Meta-analysis .JAMA. 2011;305(12):1225-1233

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°27 - Mars 2011

Heureux les simples d'esprit…

Rassurez-vous, en ce mois de Mars à l'actualité si lourde, je ne vais pas vous faire un sermon à la Bossuet même si nous approchons de Pâques.

La lecture des journaux et l'écoute des nouvelles n'incite pas à une franche rigolade et pourtant comme dans toute situation la lumière côtoie la noirceur : la joie d'un adolescent qui entrevoie la liberté pour son pays, l'admirable attitude d'un peuple à la sagesse millénaire face au danger venu de la terre qui gronde.

Dans ce catastrophisme ambiant un article (1) de Catherine Vincent intitulé « les vertus de la mauvaise humeur » paru dans le Monde Magazine du 12 mars a suscité toute ma curiosité. La journaliste y parle des travaux (2) de Joseph Forgas, chercheur en psychologie à l'université de Sydney. Ce scientifique étudie depuis de nombreuses années les performances de mémorisation de sujets selon leur humeur et il compare les joyeux aux multiples râleurs-bougons-grincheux-hargeux-teigneux et autres acariâtres. Il n'y a aucun doute : les réjouis-radieux ont de moins bonnes performances cognitives.

Serions-nous enfin confrontés à un vrai choix de société : soit nous lever tous les matins de mauvais poil en bougonnant contre tout et contre tous et avoir ainsi, le soir venu, la tête remplie de choses importantes ou, au contraire, traverser le monde avec un sourire béat au coin des lèvres et nous endormir la tête vide avec juste le néant entre nos deux oreilles.

Le choix semble cornélien. En réalité, pas tant que cela, du moins pour notre santé. Les bougons-râleurs ont le comportement des guerriers, toujours en éveil, concentrés, attentifs à la moindre chose qui pourrait les menacer. Ils se souviennent ainsi mieux de ce qu'ils ont considéré comme un danger potentiel. Les joyeux-enchantés, en revanche, se promènent dans le monde en sifflotant, la tête dans les nuages, le nez au vent et fixent moins bien les détails du parcours tout occupés à jouir de leur bonheur. Pour ce qui est des souvenirs, la balance penche, sans conteste en faveur de ceux qui se lèvent du pied gauche. Joseph Forgas oublie cependant de nous dire que les bienheureux-satisfaits tiennent leur revanche : les râleurs-hostiles meurent beaucoup plus vite (3), en particulier d'infarctus.

Faut-il pour autant conseiller aux teigneux-grincheux de faire semblant d'être de bonne humeur en arborant un sourire de façade afin d'avoir tout à la fois une grande mémoire et d'éviter l'infarctus ? Et bien non ! Cette solution est encore plus mauvaise pour eux comme le montre un travail très récent (4) de Brent Scott de l'université du Michigan rapporté dans l'Academy Journal of Management : simuler la bonne humeur est très mauvais pour le moral et vous savez tous que la tristesse augmente le risque d'infarctus.

Comment faire alors pour diminuer le risque cardiaque sans devenir pour autant un imbécile heureux ou un heureux imbécile ? Surtout ne choisissez pas entre la mémoire et le bonheur. Prenez les deux, vous en avez parfaitement le droit, il n'y a aucun règlement qui l'interdit. Cultivez votre présence au monde en toute attention en étant « ici et maintenant » dans votre vie quotidienne, souriez vraiment de la tête aux pieds et vous verrez le monde changer autour de vous et si vous vous réveillez le matin de mauvaise humeur, acceptez-le, ceci fait aussi partie de la vie. Moins vous lutterez contre votre pied gauche, plus vite il vous fera sourire. Prenez soin de vous…

Références :

  1. Les vertus de la mauvaise humeur. Catherine Vincent. Le Monde magazine 12 Mars 2011. Page 73
  2. Forgas JP. On feeling good and getting your way: mood effects on negotiator cognition and bargaining strategies. J Pers Soc Psychol. 1998 Mar;74(3):565-77
  3. Lemogne C, Nabi H, Zins M, Cordier S, Ducimetière P, Goldberg M, Consoli SM. Hostility may explain the association between depressive mood and mortality: evidence from the French GAZEL cohort study. Psychother Psychosom. 2010;79(3):164-71.
  4. Scott Brent A. A Multilevel Field Investigation of Emotional Labor, Affect, Work Withdrawal, and Gender. AMJ 2011. 54 : 116 - 136

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LE M'EDITO N°26 - Février 2011

La double peine…

Nous avons déjà insisté à plusieurs reprises dans cette rubrique et sur ce site sur l'importance de la dépression pour les patients atteints de problèmes cardiaques : il est parfaitement établi depuis plusieurs années que la dépression favorise la survenue d'un infarctus ou d'une insuffisance cardiaque et que, de plus, elle est un facteur de mauvais pronostic pour ces mêmes pathologies.

Une publication (1) de Hermann Nabi et de l'équipe de Mika Kivimäki dans la revue « Heart » a ainsi rappelé en octobre dernier que la dépression multipliait par 3 le risque de mortalité des patients cardiaques. Le travail (2) de l'équipe danoise de Karen Kjaer Larsen qui vient d'être publié dans le très sérieux journal « Circulation » il y a quelques jours est encore plus intéressant. En effet ces chercheurs ne se sont pas contentés de regarder le lien entre la survenue d'un infarctus et le risque de dépression, ils ont pour la première fois étudié le taux de suicide après infarctus chez des patients indemnes ou non de problèmes dépressifs ou psychologiques avant leur accident cardiaque et ceci sur une population de plus de 20000 patients sur une durée de 25 ans.

Les résultats sont sans appel : les patients victimes d'infarctus se suicident 4 fois plus que les autres. Cela est surtout vrai pour les sujets jeunes durant le premier mois qui suit l'infarctus. Cette relation est plus forte pour les patients qui présentaient des antécédents psychiatriques. La tendance se poursuit dans les années suivantes, même si elle est moins frappante. Comment expliquer ces constatations ? Des travaux expérimentaux ont montré que lors d'un infarctus, la libération de facteurs inflammatoires peut provoquer dans le cerveau limbique une destruction de l'hippocampe entraînant ainsi une dépression aigüe, facteur de risque de suicide.

Cette explication n'est pas suffisante. La dépression post-infarctus est surtout le témoin du profond bouleversement psychologique vécu par le patient. En effet, il s'agit pour beaucoup, en particulier les sujets jeunes, de la première confrontation avec la maladie et le risque de mort. L'infarctus marque alors la fin du fantasme d'une illusoire immortalité. Par ailleurs, comme l'ont montré plusieurs travaux (3) en psychologie de la santé, l'être humain, pour tenter de vivre de façon harmonieuse dans un monde apparemment absurde, se construit un univers fondé sur ses propres valeurs et se fixe des objectifs de vie conformes à celles-ci : valeurs et objectifs de travail, de famille, de loisirs, de croyances. La survenue brutale d'un infarctus remet totalement en cause cet édifice fragile créé par chacun d'entre nous. Il s'agit d'un véritable moment de chaos, une plongée dans le mystère : que vais-je devenir ? Pourquoi moi ? Quelle faute ai-je commise ? Dans cette période de grande instabilité où vie et mort sont si proches, le risque de passage à l'acte suicidaire est majeur.

L'éditorial (4) qui accompagne l'article de K.K Larsen affirme que nous avons les moyens d'éviter aux patients la double peine : le suicide après l'infarctus. R.B Williams y fait un vibrant plaidoyer pour l'accompagnement psychologique en insistant sur la prise en charge non médicamenteuse. Un tel engagement dans la revue de référence de la cardiologie mondiale nous conforte dans le bien-fondé de la démarche que nous avons engagée sur ce site.

Nous sommes tous mortels ; nous l'oublions souvent et la maladie vient parfois nous le rappeler brutalement. Comme le dit avec humour l'acteur Michel blanc : « c'est par peur de la mort que je pense au suicide ».

Notre souhait en ce début d'année est que nous sachions proposer une aide psychologique aux patients à risque cardiovasculaire et particulièrement à ceux qui traversent ce moment si délicat à négocier qu'est l'infarctus du myocarde.

Références :

  1. Nabi H, Marmot MG, Kivimäki M,et al. Effects of depressive symptoms and coronary heart disease and their interactive associations on mortality in middle-aged adults: the Whitehall II cohort study. Heart. 2010 Oct; 96(20):1645-50.
  2. Larsen KK, Agerbo E, Christensen B et al. Myocardial Infarction and Risk of Suicide: A Population-Based Case-Control Study. Circulation. 2010; 122(23):2388-2393.
  3. Boersma SN, Maes S, van Elderen T.Goal disturbance predicts health-related quality of life and depression 4 months after myocardial infarction. Br J Health Psychol. 2005 Nov; 10(Pt 4):615-30
  4. Williams RB. Myocardial Infarction and Risk of Suicide: Another Reason to Develop and Test Ways to Reduce Distress in Postmyocardial-Infarction Patients? Circulation. 2010; 122(23):2356-2358.

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°25 - Janvier 2011

Une indignation peut en cacher une autre… !!!

Les temps sont propices à l'indignation. Rappelez vous, il y a bien longtemps en Avril 2009, je vous avais parlé de la colère si néfaste pour le cœur. J'avais aussi évoqué l'indignation, sa petite cousine non violente. Je ne pensais pas alors que ce mot serait en tête du hit parade des expressions du langage branché 2011.

Il a suffit qu'un vieil homme de 93 ans publie un petit opuscule de 30 pages (1) pour que ce mot soit dans toutes les bouches et que s'agitent les tenants du pour et les partisans du contre. Les premiers en appellent à une résistance, les seconds évoquent une imposture.

Que dire de l'indignation ? Tout d'abord une simple vérité : chacun sait qu'il est beaucoup plus facile de s'indigner de l'attitude des autres que de son propre comportement.

Cela dit, il est bon de rappeler qu'aucune indignation, si justifiée soit-elle, ne peut en exclure une autre tout aussi légitime et qu'il n'existe pas de mètre-étalon de l'indignation. Il faut cependant bien constater que certaines sont oubliées, que d'autres prennent le devant de la scène souvent à juste titre, mais parfois au risque d'un effet d'éblouissement masquant ainsi la complexité des situations.

Je sors ainsi de l'ombre une indignation cachée par un récent scandale de santé publique : connaissez-vous une plante médicinale cultivée depuis plus de 3000 ans, ramenée en Europe par Christophe Colomb et dont les effets toxiques sont connus depuis de nombreuses décennies ? Elle est en vente libre en France et partout dans le monde, rapporte des milliards d'euros aux firmes qui la commercialisent et aux états qui la distribuent en monopole. Ses effets secondaires sont hallucinants : chaque année 60000 morts en France et de plus de 5 millions dans le monde. Il n'y a pas de posologie fixée pour son emploi (la dose moyenne est de 20 par jour, mais certains montent à plus de 60). Les officines qui la distribuent poussent l'impudence jusqu'à la présenter dans des emballages magnifiquement « markétés » en n'omettant jamais, car la loi les y oblige, de préciser son risque mortel. Cette annonce permet bien entendu aux fabricants et aux vendeurs d'être dédouanés de toute responsabilité quand le consommateur meurt, puisque ce denier est prévenu.

Vous avez bien sûr reconnu « Nicotiana Tabacum » autrement dit le tabac, l'herbe à Nicot. En santé publique comme dans beaucoup de domaines, il ne faut pas que l'arbre même, et surtout s'il est pourri, cache la forêt.

Pourquoi parler ici du tabac. Certainement pas pour critiquer les fumeurs (je vous ai avoué le mois dernier mon addiction au chocolat). Simplement pour rappeler les liens très étroits entre le stress psychosocial et l'intoxication tabagique.

La consommation du tabac est liée au stress, à l'anxiété, à la dépression. Les fumeurs utilisent souvent leur cigarette comme moyen de gestion d'un stress aigu (conflit, colère, attente, inquiétude) ou comme récompense après un moment difficile. Les rechutes sont favorisées par la dépendance à la nicotine et surtout par des raisons psychologiques.

Dans cette période de doute sur l'innocuité de certains médicaments, il est important de rappeler que l'aide psychologique fait partie intégrante, avec les substituts nicotiniques, des moyens efficaces d'arrêt du tabac (thérapies cognitivo-comportementales, méditation, relation d'aide, hypnose solutionniste, relaxation). Un article très intéressant est sorti il y a quelques semaines dans le journal « Nicotine and Tobacco Research » : on connaissait depuis longtemps les bienfaits physiques de l'arrêt du tabac ; l'équipe de CW Kahler (2) vient de montrer que les patientsqui arrêtent leur intoxication tabagique deviennent également plus heureux et plus optimistes. Fumer ne rend pas heureux, contrairement à ce que nous affirment les publicitaires.

Alors, indignons nous haut et fort de ces 60000 morts injustifiés et utilisons toute notre énergie pour développer une aide psychologique efficace pour ceux qui veulent définitivement abandonner la perverse Nicotiana. Le seul effet secondaire sera positif, nous verrons augmenter le CBI (coefficient de bonheur par individu)… et ça, c'est bon pour la planète.

Références :

  1. Stéphane Hessel. Indignez vous. Editions Indigènes. 2010
  2. CW. Kahler. Nicotine and Tobacco research. Editions en ligne du 24 Novembre 2010.

Prenez soin de vous…
Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°24 - Décembre 2010

Les femmes et le chocolat

N'ayez aucune crainte, ce mois-ci je ne vais pas vous écrire un petit édito macho et sexiste pour affirmer que seules les femmes aiment le chocolat et que cela est néfaste pour leur ligne et leur santé. Je n'oserai jamais écrire une telle contre-vérité, étant moi-même un adorateur du dieu Cacao.

Non, je voulais vous parler des femmes, puis du chocolat et nous verrons bien si je parviens à faire un lien entre ces deux propos.

Le congrès annuel de l'American Heart Association vient de se terminer il y a quelques jours à Chicago et parmi les multiples travaux qui y ont été présenté, celui du docteur Michelle Albert de Boston mérite une grande attention. En se fondant sur les données de la Women's Health Study son équipe a en effet montré que le stress au travail était extrêmement néfaste pour le cœur des femmes. Jusqu'à présent cet effet avait surtout été démontré chez les hommes.

Dans cette étude, il ne s'agit pas de femmes exerçant des professions dites à hautes responsabilités et supposées stressantes, mais de salariées comme on en rencontre des millions travaillant en particulier dans le monde de la santé. Elles déclaraient « exercer un métier soumis à de multiples pressions, avec un faible pouvoir décisionnel, peu de libertés d'action et de création »… en bref le quotidien de beaucoup d'infirmières et d'aides-soignantes. L'équipe de Michelle Albert constate que le stress entraine des effets à la fois à court et à long terme, élément sur lequel nous avons souvent insisté sur ce site. La crainte d'une perte d'emploi est associée à la survenue de facteurs de risque artériel (hypertension, surcharge de poids, augmentation du cholestérol) et après un suivi de 10 ans le risque d'infarctus est augmenté de 88% et celui de pontages coronaires de 43%.

On savait les femmes plus sensibles au stress familial, on découvre maintenant qu'elles sont à l'égal de l'homme pour la souffrance au travail. La moindre des choses, me direz vous, serait de leur reconnaître une égalité de salaire. Oh, là attention… dans notre société qui prône de façon hypocrite la parité en politique, mesdames, ne rêvez pas, n'espérez pas demain une feuille de salaire égalitaire. Vous risqueriez d'être chocolat !!! (ça y est j'ai réussi à faire le lien).

Je n'ai jamais compris l'origine de cette expression populaire qui associe le fait de se faire rouler dans la farine avec le plaisir de croquer quelques grammes de douceur chocolatée, totalement nature, plus ou moins forte en cacao, agrémentée parfois de pralines, de noix, de noisettes, d'amandes, de ganache, de pistaches, de gingembre, de raisins, d'alcool (non, ceux là je les laisse dans la boite…). Certains linguistes distingués nous expliquent que ce dicton aurait pour origine une sombre histoire de clown nommé chocolat perpétuellement ridiculisé. J'avoue ne pas trop croire à cette explication et je suis plutôt enclin à penser que depuis sa découverte les êtres humains savent que cette denrée précieuse est excellente pour la santé et constitue un petit antidépresseur naturel, en particulier quand on s'est fait berné.

Cet effet antidépresseur souvent mentionné n'est pas à ce jour prouvé. En revanche, les bénéfices du chocolat sur les artères coronaires semblent de plus en plus convaincants. Dans plusieurs études, dans lesquelles malheureusement je n'ai pas été inclus, il est montré que la consommation raisonnable de chocolat provoque un effet bénéfique sur le développement de l'athérome. Cet effet n'est certes pas majeur et la consommation doit rester modérée (quelques morceaux de chocolat noir par semaine). Les « accros » de mon espèce ne peuvent donc pas trouver dans ces travaux une légitimation à leur penchant coupable.

Par ailleurs il n'est pas question à l'approche des fêtes de fin d'année de penser qu'une faible consommation régulière peut être compensée par une grande orgie chocolatée le soir du réveillon afin de rattraper le retard. Ne cherchez pas à m'adoucir avec une boîte de pralines… Je resterai inflexible : le gourmand ne viendra pas à bout du scientifique. Ne soyez pas gloutons mais plutôt esthètes. Profitez donc du plaisir subtil d'un bon morceau de chocolat pour faire un peu de méditation en pleine conscience et vous faire le cadeau d'un vrai moment de présence.

En cette fin d'année, mesdames, prenez grand soin de vous et ne vous laissez pas épuiser par le stress au travail. Quant à vous messieurs vous avez le droit d'offrir à votre entourage féminin quelques friandises cacaotées… cela sera bon pour les coronaires de vos compagnes et aussi pour les vôtres (n'en profitez pas pour lui piquer toute la boite).

A l'année prochaine et… prenez tous soin de vous, car, n'oubliez jamais, vous êtes unique et vous le valez bien !!!

Meditas Cardio vous souhaite un joyeux Noël et de très bonnes fêtes de fin d'année.

Références

  1. http://www.newsroom.heart.org/index.php?s=43&item=1151
  2. Djoussé L, Hopkins PN, North KE, Pankow JS, Arnett DK, Ellison RC. Chocolate consumption is inversely associated with prevalent coronary heart disease: The National Heart, Lung, and Blood Institute Family Heart Study.Clin Nutr. 2010 Sep 1.

Prenez soin de vous…

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LE M'EDITO N°23 - Novembre 2010

Le présent du père Noël…

Les mois d'hiver ont commencé (même si nous sommes encore en automne) avec leurs jours plus courts, leur ciel plus bas, leur soleil plus rare et cette envie de nous recroqueviller parfois au coin du feu…

L'autre jour, une vision singulière m'a brusquement sorti de cette relative hibernation : le père Noël était accroché à la façade d'un grand magasin. Il était totalement immobile, tel un alpiniste surpris en plein hiver par la tempête sur la face nord du Cervin. Il cherchait manifestement à reprendre des forces, à se refaire une santé avant de poursuivre sa course. Je me demandais alors s'il était dans l'ascension ou dans la descente souvent plus dangereuse. Ma question resta sans réponse. Le soir, repassant au même endroit, il était toujours là, dans la même posture. Le lendemain, le surlendemain et les jours suivants, il n'avait pas bougé d'un iota et il n'avait même pas pris la peine de se glisser dans un sac de couchage pour mieux se reposer.

J'entrepris alors de rester devant la porte de ce grand magasin pour vérifier les horaires de travail de ce père Noël alpiniste et quelle ne fut ma surprise de constater que cet homme travaillait vingt quatre heures sur vingt quatre : il ne bougeait pas, mais était présent à son poste sans discontinuité. Un bref instant, j'ai pensé alerter les syndicats pour cette atteinte manifeste au droit du travail, puis j'ai décidé de m'adresser à mon collègue de médecine du travail. Ce dernier comprendrait immédiatement que, si la situation perdurait, le père Noël risquait de faire un Karoshi (vous savez bien, ce tableau de mort subite décrit par les Japonais chez des salariés travaillant plus de 16 heures par jour). Il me semblait dommage que le père Noël meure ainsi sans l'hommage dû à son rang à six semaines du 24 décembre.

Et là j'ai soudain réalisé : que fait donc le père Noël sur cette façade, chargé comme un déménageur au début du mois de Novembre ? Est-il victime d'une précarisation de sa fonction ? Doit-il lui aussi travailler plus pour espérer ne pas gagner moins ? Est-il relié à un GPS qui indique en permanence sa position afin de vérifier qu'il ne badine pas avec l'itinéraire qu'on lui a imparti ? Est-il contraint de commencer sa tournée beaucoup plus tôt dans l'année en raison des objectifs irréalisables qu'on lui a imposés ? Est-il menacé par une lente déshumanisation de son activité ? A-t-il choisi personnellement de travailler plus lentement pour tenter de conserver ce temps d'échange avec les autres, même si le Boss lui a affirmé que tout cela était dépassé et qu'il fallait maintenant faire du chiffre ? Le cœur du père Noël était il menacé par ce stress professionnel majeur ? Fallait-il lui proposer de faire quelques séances de gestion du stress ?

J'étais perdu dans cet océan de questions, quand je levais les yeux et je vis que non seulement le père Noël faisait de l'alpinisme depuis plus de huit jours sur cette façade mais, qu'en plus la rue était entièrement illuminée de guirlandes et le lampions sur lesquels étaient inscrit : « Joyeux Noël et bonnes fêtes ».

Morale de l'histoire. Le père Noël a, je l'espère, encore de beaux jours devant lui : la preuve, j'y crois encore ! Je crois en effet qu'il est possible à chercher à vivre la vie le plus souvent au moment présent comme nous l'enseigne la méditation en pleine conscience. Noël, temps des cadeaux, temps des présents, temps du partage aura lieu cette année encore le 25 Décembre et non le 10 Novembre comme voudraient nous le faire croire quelques vendeurs de biens consommables.


Prenez soin de vous…


Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°22 - Octobre 2010

Que d'émotions… que d'émotions

Il y a presque deux ans, le site Meditas Cardio a ouvert ses portes. Il est le porte parole du projet Meditas Cardio qui avait pour but d'étudier la possibilité de prise en charge du stress psychosocial dans une population de patients à risque cardiovasculaire. Ce projet a demandé quatre ans d'effort depuis son initiation jusqu'à la sortie des résultats.

Au-delà des chiffres qui montrent l'impressionnante efficacité de cette démarche, c'est surtout l'émotion et le partage qui étaient au rendez-vous lors de la réunion de publication des résultats le 2 Octobre.

Constater que les patients ont amélioré leurs connaissances, que les niveaux de stress, d'anxiété et de dépression ont baissé de façon significative, que 73% des patients ont diminué ou arrêté leurs médicaments psychotropes, qu'un processus de changement a été amorcé pour améliorer la diététique, diminuer l'intoxication tabagique et la sédentarité, tout cela est très bien mais au-delà de ces résultats bruts, c'est l'intensité de l'expérience vécue qui apparaît.

Certains ont plus que d'autres adhéré à cette démarche nouvelle, mais la réussite du projet tient surtout dans les témoignages de vie.

Témoignages d'action d'un patient qui s'approprie le processus et parvient à mettre sur pied des ateliers de relaxation, de tel autre qui développe la gestion du stress dans le monde de l'entreprise. Témoignage de changement pour celui qui, pétri d'humour, a compris que ce n'est pas le monde qu'il faut changer, mais notre propre vision du monde. Témoignage de bouleversement pour celui qui ose choisir ce qui lui convient vraiment et met en accord sa vie avec ses valeurs fondamentales.

Brigitte Sandrin-Berthon a écrit « en éducation thérapeutique on ne sait plus qui éduque qui ». Quand il y a rencontre vraie entre deux personnes, il y a échange. Échange, cela signifie que les patients inclus dans le programme ont reçu, mais que les médecins et les psychologues ont aussi beaucoup reçu.

Merci donc à tous les patients qui ont accepté de participer à ce programme, qui nous ont fait confiance et nous ont donné plus qu'ils ne l'imaginent.

La publication des résultats du programme Méditas Cardio ne marque pas la fin d'un processus, mais plutôt le commencement d'une nouvelle aventure, afin de faire fructifier ce qui a pu être découvert et échangé durant cette aventure passionnante.

Encore merci à tous les acteurs de ce projet, à nos partenaires financiers sans lesquels Meditas Cardio serait resté un souhait et non une réalité.


Prenez soin de vous…


Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°21 - Septembre 2010

L'empathie, parlons en…

Nous avons déjà évoqué à plusieurs reprises dans cette rubrique la notion d'empathie, en particulier en parlant de nos proches cousins, les grands singes et de leur capacité d'altruisme que nous avons tant de difficultés à faire nôtre.

Mais au fait comment définir l'empathie et que savons-nous à l'heure actuelle de cette disposition que nous ne partageons pas tous de façon équivalente ?

Le mot « Empathie » a été inventé il y a plus de 100 ans par le philosophe Richard Vischer pour désigner le mode de relation esthétique d'un sujet avec une œuvre d'art. Par la suite Théodore Lipps introduisit la dimension affective qui a perduré dans la conception actuelle de l'empathie : un état émotionnel donné chez un individu déclencherait de façon automatique ce même état émotionnel chez un observateur.

Le mot a été formé à partir des racines grecques « en » et « pathos » qui signifient « à l'intérieur » et « souffrance ». Il exprime qu'il est possible de comprendre la souffrance de l'autre. Cette « compréhension » est bien différente de la sympathie qui par ses origines étymologiques signifie « souffrir avec ».

Dans la pratique, sur quoi repose cette compétence ? Nous le savons maintenant de façon beaucoup plus précise, en particulier grâce aux progrès des neurosciences.

La découverte des neurones miroirs par l'équipe italienne de Giacomo Rizzolatti a révolutionné la conception de l'empathie : de quoi s'agit-il ? Ce chercheur a mis en évidence que lorsque nous regardons quelqu'un vivant un événement ou une émotion, s'activent à l'intérieur de notre cerveau les mêmes neurones que dans le cerveau de celui qui vit réellement la situation. Par exemple quand nous regardons un funambule sur un fil, nous bougeons presque autant que lui. Cette faculté, nommée résonance émotionnelle, survient très tôt dans la vie. Vous pouvez l'expérimenter facilement en tirant la langue ou mieux en faisant un grand sourire à un bébé de quelques mois.

La résonance émotionnelle ne résume cependant pas l'empathie car si elle permet de vivre l'émotion en direct, elle ne permet pas de la comprendre. Vers l'âge de 3 à 4 ans dans le cerveau des primates et des humains se développe au niveau du cortex préfrontal la possibilité de se représenter l'émotion d'autrui en mobilisant une capacité à se représenter soi-même comme distinct de l'autre : c'est ce qu'on nomme l'inférence émotionnelle. Il ne s'agit plus seulement d'une résonance par l'activation de neurones miroirs, mais bien d'un processus d'imagination qui nous permet de comprendre l'émotion de l'autre même sans l'avoir vécu soi-même : je suis distinct de l'autre mais je peux entendre par exemple la souffrance d'une mère qui a perdu un enfant.

Comme le dit le psychiatre Robert Friedman « ce qui importe pour comprendre les sentiments d'autrui, ce n'est pas d'avoir vécu la même expérience que lui, mais d'être capable d'imaginer ce que ce serait de la vivre». Nicolas Danziger, neurologue à Paris, travaille sur cette capacité imaginaire en étudiant l'empathie chez des patients souffrant d'une affection qui les rend insensibles à la douleur. De façon paradoxale ces sujets ont développé une plus grande capacité d'empathie et il ajoute : « pour être humain, profondément humain, il faut donc une bonne dose d'imagination ».

Nous ne sommes donc pas égaux pour l'empathie, car si nous possédons tous des neurones miroirs, nos possibilités imaginatives sont variées et parfois faibles. Des travaux récents comme ceux de Jean Decety montrent que les soignants et, en particulier, les médecins sont moins empathiques qu'une population témoin. Ceci s'expliquerait par un mécanisme de protection contre un risque d'émotion trop envahissante : moins d'empathie serait utile dans les situations où l'efficacité technique doit être privilégiée. Les soignants savent combien il est difficile de s'occuper médicalement d'un proche.

Ressentir, imaginer, tels sont les piliers de l'empathie en prenant toujours bien garde à se considérer comme distinct de l'autre et en sachant trouver la juste mesure : comme vient de le rappeler Hélène Riess dans le JAMA, le manque d'empathie entraîne pour les soignants un risque d'insatisfaction professionnelle, d'addiction en particulier alcoolique, de suicide alors qu'un excès d'empathie mal comprise (face à l'autre je m'oublie) conduit au burn-out et à la dépression.

Développons notre empathie pour le plus grand bien de tous, mais n'oublions jamais : prenons soin de nous.

  1. Nicolas Danziger. Vivre sans la douleur. Ed. Odile Jacob. Paris. Septembre 2010.
  2. Jean Decety. The social neurosciences of empathy. 2009
  3. Helene Riess. Empathy in médicine. A neurobiological perspective. JAMA, 2010 ; 304 :1604-5.

Prenez soin de vous…


Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°20 - Juillet-Août 2010

A chacun son chemin pour grandir…

« C'est incroyable à quel point son cancer a été une source extraordinaire de grandissement, d'ouverture à l'autre ». Cette réflexion étonnante, voire choquante pour beaucoup, vient d'être faite par un très proche de Bernard Giraudeau décédé il y a quelques jours. Un proverbe arabe nous apprend qu'un homme qui nous quitte c'est comme une bibliothèque qui brûle. Bernard Giraudeau était une très grande bibliothèque. C'était un grand voyageur, un excellent acteur, un très bon écrivain, et pourtant il affirmait que c'est le cancer qui lui avait fait découvrir la réalité du monde, l'amour des autres et l'acceptation de lui-même. Chemin incroyable d'un rebelle assoiffé de vie, perpétuel insatisfait, qui commence son parcours en faisant le tour du monde en bateau, pour le terminer en vivant son rôle le plus juste et le plus émouvant sur le site internet « la maison du cancer » (1) et en enregistrant des séances de méditation en pleine conscience pour le dernier livre de Jon Kabat-Zinn (2).

La maladie, outil de croissance de l'être humain, quel propos périlleux ! Le risque de déraper vers une louange de la souffrance est toujours menaçant, mais dans le cas présent il n'est pas question de se mortifier, de glorifier la maladie, de la souhaiter, de penser qu'elle est un passage nécessaire. Il nous est seulement demandé de prêter une oreille attentive, non pas à des élucubrations de philosophe de salon en pleine santé, mais à la parole des patients, pas tous célèbres, qui nous tiennent le même discours ancré dans la réalité : « si vous saviez tout ce que la maladie m'a appris ».

Ces malades que nous côtoyons ne sont pas dans le déni, ils reconnaissent leur part souvent destructrice de souffrance et de doute quotidien, mais en même temps ils nous font part d'un mystère qui ne cesse de les étonner eux-mêmes et leur entourage. Les Thérapeutes d'Alexandrie (3) qui étaient des moines-médecins au début de l'ère chrétienne savaient bien que l'homme a parfois besoin de frôler la mort ou de se confronter à elle pour apprécier le caractère précieux, fabuleux, enthousiasmant de la vie et que l'être humain peut apprendre de sa maladie.

Cette part de mystère dans la possibilité de « grandissement » d'un patient malade met parfois mal à l'aise l'entourage proche qui ne reconnaît plus l'autre et également le soignant rationnel qui ne comprend pas ou n'écoute pas ce qui est exprimé.

Que nous soyons les proches ou les soignants de ce malade, sachons nous taire, faire silence, écouter : l'autre n'attend aucune réponse de notre part, tout simplement parce que la réponse est déjà en lui et qu'il attend simplement une rencontre humaine pour la découvrir, c'est-à-dire enlever le voile qui la recouvrait.

Le philosophe Yvan Amar dans son livre « l'effort et la grâce » exprime parfaitement ce souhait d'écoute silencieuse (4). Cet homme connaissait bien la maladie chronique puisqu'il est mort d'insuffisance respiratoire en 1999 à l'âge de 49 ans, les yeux grands ouverts comme l'a écrit Marie de Hennezel dans le livre (5) qu'elle lui a consacré. "Si quelqu'un me guérit et me retire mon mal, j'entends aussi qu'il me hisse au niveau de conscience que j'aurais atteint si j'avais moi même résolu ce que ce mal devait m'apprendre. Sinon, s'il me laisse dans le même état de conscience après m'avoir retiré mon mal, il me vole l'outil de croissance que peut être cette maladie. ».

Pour Jean-Yves Leloup, le thérapeute au sens primitif du mot n'est pas supposé savoir, mais supposé écouter. Ecouter, c'est renoncer à répondre à une question qui semble nous être adressée, mais qu'en réalité le patient se pose à lui-même. En éducation thérapeutique, sachons donner assez d'écoute au patient pour qu'il puisse guérir au sens où l'entendaient les premiers thérapeutes : « guérir, c'est dénouer ses liens pour devenir vraiment soi-même. ».

Le docteur Meditas vous souhaite de bonnes vacances et vous retrouve en septembre…

  1. www.la-maison-du-cancer.com
  2. Jon Kabat-Zinn. Mediter . Ed. Les Arenes. 2010 (CD de Bernard Giraudeau)
  3. Jean-Yves Leloup : Prendre soin de l'être : Philon et les Thérapeutes d'Alexandrie. Éd. Albin Michel, 1999.
  4. Yvan Amar. L'effort et la grâce. Ed. Albin Michel 2005.
  5. Marie de Hennezel, Nadège Amar. Mourir les yeux ouverts. Ed. Albin Michel, 2005.

Prenez soin de vous…


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LE M'EDITO N°19 - Juin 2010

Gare au Care !

Non, il ne s'agit ni d'une faute d'orthographe ni d'un éditorial commandité par la SNCF, mais bien du Care, du vrai, pas celui qui a agité le monde politique il y a quelques semaines avant que le chaos médiatico-politico-sportivo-scandalo-juridico-économique (vous pouvez intervertir les propositions) ne l'engloutisse complètement.

Le Care primitif est né il y a bien longtemps ; plus précisément dès que les animaux ont eu assez de cerveau pour développer un peu de compassion et d'empathie afin de s'entraider (les éléphants, les dauphins, les grands singes le font…). La langue anglaise a l'avantage d'être très concise et de pouvoir exprimer en un seul mot des idées complexes que nous devons formuler en français en plusieurs phrases. Le Cure, c'est l'acte de traiter pour obtenir une guérison si possible définitive. Les soignants que nous sommes ont surtout été formés à cet aspect de la médecine et se sentent démunis devant la maladie chronique et inguérissable qui demande du Care. Le Care, c'est prendre soin dans un but préventif, mais aussi pour soulager, pour aider, pour accompagner.

Les médecins, et plus généralement les soignants peuvent le faire, mais de plus en plus de non soignants sont amenés à s'investir plus ou moins volontairement dans ce type de prise en charge. Il peut s'agir d'une personne faisant partie d'une association d'aide à domicile, d'un bénévole rendant visite aux personnes malades et surtout des conjoints de malades chroniques. Les anglo-saxons appellent ces soignants dans le couple, des « caregivers » c'est à dire des donneurs de soins. Ils donnent du soin et souvent donnent beaucoup d'eux-mêmes, parfois trop et cela les fait souffrir.

Cette souffrance est rarement évoquée en France et pourtant c'est un motif de plainte très fréquent en consultation pour le couple dont l'un est malade (cancer, insuffisance cardiaque, accident vasculaire cérébral, maladie d'Alzheimer). On savait déjà que le tableau d'épuisement du Burn-Out avait été décrit la première fois chez des bénévoles ayant des fonctions dans les associations caritatives. On sait maintenant que les donneurs de soin dans le couple s'exposent à de graves soucis de santé, en particulier au risque d'accident cardiaque pour les femmes (1). Une étude récente nous montre que ce risque cardiaque est favorisé par une altération de la fonction endothéliale qui marque l'étape initiale de l'athérome (2).

Cette situation de « Caregiver », non désirée, permanente, solitaire, expose en effet au risque d'épuisement, de colère, de culpabilité, d'anxiété, de dépression, c'est-à-dire à beaucoup des ingrédients psychosociaux favorisant l'infarctus.

Donc Gare au Care : prendre soin de l'autre fait partie de notre humanité, mais il faut parvenir à le faire en continuant à prendre soin de soi-même. Sachons nous aussi demander de l'aide aux autres quand cela est nécessaire. A quel moment ? C'est simple à ressentir : quand nous sommes fatigué, que la personne que nous soignons nous énerve, et que nous nous sentons en même temps coupable d'être irritable. Ces signes d'alerte nous indiquent que notre santé est en danger, ceci aussi bien pour les caregivers bénévoles que pour les donneurs de soins professionnels. Ne l'oublions jamais : prendre soin des autres, c'est aussi prendre soin de soi.

    1. Lee S, Colditz GA, Berkman LF, Kawachi I. Caregiving and risk of coronary heart disease in U.S. women : a prospective study. Am J Prev Med. 2003 Feb;24(2):113-9
    2. Mausbach BT, Roepke SK, Ziegler MG, Milic M, von Känel R, Dimsdale JE, Mills PJ, Patterson TL, Allison MA, Ancoli-Israel S, Grant I. Association between chronic caregiving stress and impaired endothelial function in the elderly. J Am Coll Cardiol. 2010 Jun 8;55(23):2599-606

Prenez soin de vous…


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LE M'EDITO N°18 - Mai 2010

Mon Dieu, mais que va-t-il nous rester ?

Rassurez-vous, je ne vais pas vous parler de la crise grecque, de la chute de l'euro, du volcan qu'on refuse d'appeler par son imprononçable nom et qui, pour nous punir de cet affront, risque de perturber à nouveau le trafic aérien pendant les vacances d'été, de la pollution du delta du Mississipi par une marée noire qui sent le dollar à des kilomètres à la ronde, du temps de ce mois de Mai qui nous pourrit les articulations et ne favorise pas la remontée de notre taux de vitamine D, du mondial de foot qui aux dires des spécialistes (dont je ne suis pas) risque de se limiter pour l'équipe de France à un court séjour dans un palace luxueux …allez j'arrête, ça suffit la coupe (du monde) est pleine…

Dans cette morosité ambiante, une nouvelle m'a réjoui le cœur. Sans doute avez-vous remarqué mon intérêt pour nos amis les grands singes, en particulier, les chimpanzés dont les comportements nous invitent quotidiennement à la plus grande modestie. Pour certains, la capacité de raisonnement, la parole, l'usage des outils seraient la manifestation de l'humanité. D'autres vous diront que c'est la conscience de la mort qui marque la limite entre les humains et le reste du monde animal. Bernique… c'est faux. Une équipe associant des chercheurs anglais, portugais, japonais a rapporté des observations mentionnant chez les chimpanzés des attitudes très proches du comportement humain à l'approche de la mort (soins, caresses, toilette, silence, éloignement du groupe afin de laisser la descendance directe veiller le mourant dans ses derniers instants). Certains, de nature pessimiste, vous diront : « Mon Dieu, mais que va-t-il nous rester si les singes se mettent à être plus humains que certains humains. Bientôt, ils organiseront des matchs de foot et se mettront à spéculer sur la valeur de la banane et ça fera encore faire baisser l'euro ». Pour ma part, je ferais plutôt partie des optimistes réalistes et je suis heureux de voir nos cousins nous rappeler le meilleur de l'Homme : l'empathie, l'entraide, la douceur, le respect même dans les moments les plus difficiles.

Ne croyez cependant pas que mon attitude soit désintéressée : je suis comme le plus vénal des traders, j'attends que mon comportement résolument optimiste me rapporte beaucoup. Je vous donne le super tuyau boursier de la semaine et surtout ne le gardez pas pour vous. Bien sûr, il s'agit plutôt d'un placement de père famille, ne vous attendez pas à doubler la mise en quelques secondes comme le font certains financiers fous. Je vous garantis cependant un placement à 22% à 10 ans : c'est le taux de diminution des accidents cardiaques pour les patients optimistes comme vient de le montrer pour la première fois l'équipe canadienne de Karina Davidson.

Investissez massivement dans l'optimisme, ça demande juste un peu d'effort au quotidien car la vie n'est pas toujours simple, mais au bout du compte (de la vie) ça peut rapporter gros… quasiment le bingo, même si la valeur n'est pas encore cotée au CAC 40. Elle risque de le devenir si nos amis les singes Bonobo dirigent un jour le monde…

    1. Dora Biro, Tatyana Humle, Kathelijne Koops, Claudia Sousa, Misato Hayashi, Tetsuro Matsuzaw. Chimpanzee mothers at Bossou, Guinea carry the mummified remains of their dead infants . Current Biology . 2010 April ;20 : 752-59.
    2. Davidson KW, Mostofsky E, Whang W. Don't worry, be happy: positive affect and reduced 10-year incident coronary heart disease: the Canadian Nova Scotia Health Survey. Eur Heart J. 2010 May;31(9):1065-70.

Prenez soin de vous…


Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°17 - Avril 2010

Prévention de 7 à 77 ans…

Il arrive un moment où l'être humain admet avec beaucoup de difficultés que l'éternité ne lui a jamais été promise et qu'il faut bien quitter ce monde un jour ou l'autre d'une façon ou d'une autre… en mourant de rire ou de colère comme nous l'évoquions le mois dernier.

Evidence, truisme, lapalissade peut-être, mais parfois en lisant certaines études médicales on se prend à rêver ou à s'interroger quand un auteur affirme sans sourire que grâce à telle intervention médicamenteuse non seulement la mortalité cardiaque baisse (ce qui est excellent) mais la mortalité globale également (ce qui est sans doute juste momentanément mais présomptueux quand on connaît le destin de l'être humain).

Un jour je m'étais permis de demander si diminuer la mortalité globale signifiait que je risquais de ne pas mourir complètement ou si au contraire certains pouvaient prétendre à la vie éternelle (qui comme chacun sait est très longue surtout à la fin…). Je n'ai pas obtenu de réponse et j'ai été pris pour un esprit rebelle à toute considération épidémiologique de haut niveau.

Mis à part ces propos dignes d'un comptoir de bistrot, il faut admettre que faire de la prévention efficace n'est pas chose aisée et qu'il faut la laisser à des gens sérieux : aucune action n'est négligeable, certains préfèreront agir juste avant notre mort pour nous donner droit à un nouveau petit tour de manège et d'autres prendront le problème à la base, presqu'au berceau.

Ainsi une enquête très sérieuse a mis en évidence une surmortalité cardiaque importante dans plusieurs établissements de Lugano où de séduisantes hôtesses faisaient commerce de leurs charmes auprès de clients venant de la rive italienne du lac (1). Plutôt que de risquer un conflit international, 38 directeurs de ces lieux de rencontre ont donc généreusement offert à ces dames une formation complète à la réanimation cardiaque et au maniement du défibrillateur. Bien entendu ils n'ont pas omis de leur rappeler que le bouche à bouche n'était plus de rigueur et qu'il fallait surtout masser avant de défibriller. Les résultats sur la mortalité cardiaque et globale sont attendus avec impatience !!!!

Plus sérieusement, il faut citer une idée japonaise absolument géniale (j'espère que les ingénieurs qui l'ont eu n'ont pas été trop stressés par leur hiérarchie). De quoi s'agit-il ? Chacun sait que nos enfants et petits enfants (et pas seulement eux) ont une fâcheuse tendance à rester les fesses vissées sur leur chaise devant leur ordinateur ou leur console de jeu. Un grand fabriquant a eu l'extraordinaire idée de fabriquer une console qui se recharge à l'aide d'un podomètre (2). Sans activité de marche, impossible de jouer, c'est simple mais il fallait y penser. Imaginez qu'il faille aller marcher pour recharger nos ordinateurs… « Chéri je sors marcher, je n'ai plus de batterie »

Pour ceux qui voudraient relier ces deux aspects extrêmes de la prévention cardiaque on peut bien entendu imaginer de recharger les défibrillateurs mis à la disposition de ces dames grâce à l'activité physique… par exemple la marche.

    1. Corriere de la sera. Février 2010 repris par : www.telegraph.co.uk/.../Swiss-prostitutes-trained-to-use-defibrillators-in- brothels-to-prevent-clients-dying.html
    2. Pokewalker : fr.wikipedia.org/wiki/PokéWalker

Prenez soin de vous…


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LE M'EDITO N°16 - Mars 2010

Joie, incompréhension… et LOL

Nous voilà déjà en Mars 2010. Nous sommes parvenus à la phase finale de l'évaluation du Projet Meditas, encore quelques semaines et les résultats définitifs seront disponibles. Les conclusions statistiques sont froides et dépourvues de cette chaleur humaine qui fait la richesse de la vraie vie… alors un peu de chaleur dans cet hiver tumultueux.

A la fin des questionnaires d'évaluation nous avions laissé une partie de texte libre afin que chacun puisse, selon son désir, exprimer son expérience et ajouter du vécu à ce projet d'éducation thérapeutique. Les réponses sont bien entendu anonymes et c'est la raison pour la quelle nous nous permettons de citer une réflexion d'un patient : « ce programme m'a permis d'avoir un outil permanent face au stress. C'est un médicament pour moi et j'essaie d'en abuser ».

Il serait facile de disserter sur le sens des mots médicament, médecin, remède, si proche de medium et d'intermède. Il serait également passionnant de parler de l'absence d'effets secondaires de la relaxation. Intéressant mais il faut laisser de la matière pour de futurs éditoriaux et au présent je préfère m'abandonner au plaisir joyeux d'avoir lu un tel commentaire.

La joie de ressentir qu'un être humain a découvert un moyen de progresser sur son chemin de vie, qu'il a osé franchir une porte. Oser, avoir confiance, parler en son propre nom, devenir autonome, c'est à dire trouver sa propre loi au travers de la transmission d'un savoir, allier son propre savoir être au savoir médical tel est le but d'un programme d'éducation thérapeutique pour le patient. Le médecin dans cette aventure devient alors un accompagnateur, une intermède, un catalyseur : il ne sait pas vraiment où le patient va parvenir et il chemine en même temps que lui. Chacun s'enrichit de l'expérience de l'autre et parfois en éducation thérapeutique on ne sait plus qui éduque qui ?

Cette façon d'envisager la médecine demande cependant beaucoup de respect. Respect du médecin envers le patient, respect du patient envers le médecin. Demander aux médecins de changer leur façon de faire, d'envisager le patient comme un acteur de sa santé et se mettre au même niveau, de prendre soin dans un rapport horizontal d'égalité et non vertical de domination est très difficile.

Cela demande beaucoup de confiance et c'est la raison pour laquelle depuis quelques semaines je baigne dans un lac d'incompréhension totale. Comment le principal dirigeant du collectif représentant les patients (CISS) a-t-il pu insulter de la sorte des médecins libéraux ? Sans doute y avait-il un calcul politique caché derrière ce propos. Il n'en reste pas moins vrai que je comprends mal ce discours dans la bouche de quelqu'un qui a contribué à l'instauration de l'éducation thérapeutique en France. Monsieur S…, dois-je prononcer votre nom et votre rapport quand on me demande de convaincre des médecins de faire de l'éducation thérapeutique ? Il paraît que vous êtes taquin, moi aussi : vous avez joué un très mauvais tour aux médecins libéraux qui sont comme nous persuadés que l'éducation thérapeutique est l'avenir de la Médecine.

En vérité nous savons bien que les hommes sont souvent beaucoup plus petits que les causes qu'ils défendent ou disent défendre et à titre personnel nous vous pardonnons cette saillie. Pardonner est indispensable pour qui ne souhaite pas stimuler de façon inutile son amygdale et risquer par là même d'augmenter son risque d'infarctus par une colère inutile. Nous tenions cependant à vous faire part de notre incompréhension car une étude récente vient de montrer que dans le couple les épouses qui ne parlent pas de leur ressenti à leur conjoint multiplient le risque de pathologie coronaire par 3.

Certains pourront rétorquer que je ne suis pas une femme et qu'heureusement pour moi nous ne sommes pas mariés… mais si jamais l'improbable se produisait, j'aimerais bien que vous me promettiez devant le maire de ne pas être trop macho avec moi et que vous cessiez d'utiliser ce que vous appelez de l'humour et qui ressemble à s'y méprendre à de la méchanceté… Mais je réalise… si vous êtes sur notre site c'est sans aucun doute parce que vous souhaitez vous inscrire à notre programme ?

« Maintenant, Monsieur S, respirez calmement… expirez lentement et souriez et même LOL comme disent les jeunes accros du SMS en pensant à la satisfaction de cet homme qui use et abuse de la relaxation… et voilà c'est aussi simple que ça… et en plus ça peut rapporter gros… presque autant que… non là j'arrête, je vous taquinais. »

Ps : pour les nuls des SMS, LOL signifie "Laughing out loud" c'est à dire : mort de rire. Ce qui est toujours mieux que mourir de colère… encore que mourir c'est toujours mourir… on en reparle le mois prochain.


Prenez soin de vous…


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LE M'EDITO N°15 - Février 2010

Eros et Thanatos

Il y a un mois la terre a tremblé en Haïti et à ce jour le bilan est hors de l'entendement.

Nous n'avons pas évoqué cette catastrophe dans le dernier éditorial pour ne pas succomber à l'immédiat émotionnel. Ce drame nous montre encore une fois que la mort et la vie ne sont pas deux éléments distincts si faciles à séparer. Une pulsion de vie extraordinaire accompagne toujours un moment de désolation extrême. La vie et la mort sont intimement liées, Eros et Thanatos sont les deux faces du vivant.

Près de 220000 victimes ont péri écrasées sous les décombres. Lors de ce séisme, un nombre non négligeable, à jamais inconnu, d'êtres humains est mort de peur, en raison de la survenue d'un infarctus, d'une mort subite par troubles du rythme ventriculaires ou par asystolie qu'il s'agisse de patients connus ou non comme cardiaques.

Plus de 8 jours après la première secousse, alors que les sauveteurs commençaient à abandonner les recherches, un nourrisson âgé de 3 semaines a été extrait vivant d'une anfractuosité. Une adolescente de seize ans a survécu à plus de 15 jours d'enfouissement. Malgré cette catastrophe les haïtiens sont unis, se regroupent, chantent, prient et retrouvent confiance en la vie.

Par quels mécanismes biologiques un nouveau-né sans défense, sans eau, sans nourriture est-il capable de survivre ? Par quels ressorts psychologiques une jeune fille trouve-t-elle assez de ressources en elle pour ne pas s'abandonner à la mort, par quels liens sociaux des êtres humains, déjà marqués par la précarité de leur existence, font-ils face à tant de malheur ?

Bien sûr il existe quelques réponses scientifiques à de telles questions. Nous devons cependant admettre que parfois la réalité de vie est plus étonnante que tout ce que nous pouvons imaginer. Nous avons ainsi tendance à penser que nos capacités d'adaptation ont été mises en place au cours de l'évolution des espèces pour privilégier la survie de l'individu, c'est le fameux « struggle for life », un combat permanent pour notre propre survie souvent au dépens de celle des autres. Il n'en est rien, cette volonté de survie egocentrique de l'individu n'est qu'une facette de l'être humain ou plus exactement du monde animal.

Frans de Waal, éthologue et professeur de psychologie à Atlanta aux États-Unis vient d'écrire un livre intitulé « L'âge de l'empathie, leçons de la nature pour une société solidaire » dans lequel il cite des observations animales qui éclairent d'un jour nouveau la nature de l'être humain : des chimpanzés sont capables de lécher les plaies de congénères attaqués par des léopards et de ralentir l'allure de la fuite pour que les blessés ne soient pas isolés. Ils sont capables également de se priver de nourriture, si cet apport d'aliment provoque souffrance ou privation pour un de leurs semblables. Ces exemples ne se limitent pas aux chimpanzés, on rencontre ce type de comportement pour de nombreuses espèces plus éloignées de l'homme : les oiseaux, les serpents ou les éléphants.

L'adaptation de l'être humain pour survivre est loin d'être une réaction monolithique et univoque. Elle repose sur un triptyque biopsychosocial. Elle associe des capacités biologiques insoupçonnées, des réactions psychologiques de compétition et parfois d'agressivité, mais aussi une disposition naturelle à l'empathie, à l'altruisme et à la compassion. Une catastrophe comme celle survenue en Haïti, nous rappelle que le véritable objectif de l'adaptation n'est pas de survivre pour soi-même, mais de survivre pour vivre ensemble. Survivre pour une société solidaire : telle est la grande leçon que nous donne le monde animal.

  1. Frans de Waal. L'âge de l'empathie, leçons de la nature pour une société solidaire. Editions Les liens qui libèrent.2010
  2. Pierre Le Hir. Des animaux doués d'empathie. Le Monde 27 Février 2010

Prenez soin de vous…


Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°14 - Janvier 2010

C'est l'amour qui mène le monde

Comment le monde peut-il fonctionner ? Qui le fait avancer ? Qu'est-ce qui le fait tenir debout ? Est-ce le pouvoir, la force, la violence, l'argent, l'intérêt…??

Non bien entendu, c'est l'amour : vous vous en doutez, mais souvent vous en doutez.

Alors en ce début d'année je vous apporte deux nouvelles preuves scientifiques témoignant de cette absolue vérité : au delà des apparences trompeuses de notre monde quotidien, c'est bien l'amour qui est le moteur du monde. L'amour sous toutes ses formes : soutien, entraide, gratitude, respect, altruisme, don…

Une équipe de chercheurs européens s'est ainsi intéressée à la question suivante : comment les européens sont-ils aussi rapidement passés il y a environ 10000 ans d'une société de chasseurs-cueilleurs à une société de cultivateurs ? Est-ce par un simple transfert de technologie depuis le Moyen-Orient ou grâce à l'invasion brutale de quelques fermiers-guerriers ? La vérité est plus douce : l'étude du chromosome Y transmis de père en fils de façon immuable nous apprend que des cultivateurs venus d'Orient ont progressivement émigré vers l'Europe et que les jolies filles locales ont trouvé ces jeunes gens suffisamment à leur goût pour les aimer et faire ensemble de beaux enfants auxquels leurs pères ont enseigné avec amour l'art de la culture.

Cet exemple ne suffit peut-être pas à vous convaincre et vous vous dites que j'embellis le tableau d'une histoire qui a peut-être été plus féroce avec force violence, viols et autres vilenies. Tournons nous alors vers nos lointains ancêtres qui partagent tant de gènes avec nous, je veux parler de chimpanzés.

Dans un monde où l'égoïsme et l'individualisme forcené ont le vent en poupe, nos cousins au front bas nous donnent une belle leçon d'humanité et d'amour. Un groupe d'anthropologues allemands et suisses ont, au terme de vingt ans de travaux, découvert que les chimpanzés en liberté sont capables d'altruisme et adoptent de façon spontanée les orphelins issus d'une autre communauté. Ce comportement se retrouve aussi bien chez les mâles que chez les femelles et il est d'autant plus marqué que la menace autour de l'orphelin est plus importante.

Pourquoi parler d'amour dans une rubrique consacrée au stress ? Tout simplement parce que c'est une des meilleures stratégies pour en réduire les effets, même si parfois les scientifiques en psychologie ont peur de l'appeler par son vrai nom et le désignent en termes plus froids (soutien social, entraide) ou le réduisent à une grande inondation de vos amygdales cérébrales par l'ocytocine…

Un dernier mot : aimez vous signifie d'abord aimez vous vous-mêmes, ceci permet de mieux aimer les autres.

PS : ce petit mot du mois n'a bien entendu aucun rapport avec une quelconque actualité nationale ou internationale récente…!!!

  1. Balaresque P, Bowden GR, Adams SM, Leung H-Y, King TE, et al. (2010) A Predominantly Neolithic Origin for European Paternal Lineages. PLoS Biol 8(1): e1000285
  2. Boesch C, Bolé C, Eckhardt N, Boesch H (2010) Altruism in Forest Chimpanzees: The Case of Adoption. PLoS ONE 5(1): e8901

Prenez soin de vous…


Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°13 - Décembre 2009

Le Thé de Noël

Une année se termine : elle a été riche d'émotions, de rencontres, de succès, de difficultés, de vie tout simplement.

Ce moment de fêtes est toujours particulier, un peu comme un temps suspendu entre deux années. Temps de l'attente, de l'enfance, de l'impatience des cadeaux. Temps de fêtes, de repas, de petits plats et de bons vins. Temps d'échange, de partage, de retrouvailles. Temps de l'entourage, de la famille, de l'humanité.

Ne vous culpabilisez pas trop si vous faites quelques petites entorses à votre régime crétois, les effets néfastes de quelques abus momentanés seront largement compensés par le bénéfice obtenu en partageant ces moments privilégiés, en distribuant votre lot de tendresse et en acceptant celle qu'on vous donne.

C'est vrai, consommer trop de graisse et de sucre est néfaste pour les artères, mais la solitude l'est tout autant comme viennent de le montrer à nouveau deux études (1,2) publiées ce mois-ci à propos de l'insuffisance coronaire et l'insuffisance cardiaque : profitez donc de ce moment pour rappeler à ceux qui vous entourent combien ils sont importants et combien vous les aimez.

Je vous conseille de le faire au coin du feu, si vous le pouvez, autour d'une bonne tasse de thé de Noël : ce thé noir si particulier au goût d'épices et de cannelle. De multiples travaux (3) montrent l'action bénéfique du thé sur la paroi artérielle par l'intermédiaire de substances appelés catéchines, formes particulières des polyphénols au pouvoir antioxydant, qui inhiberaient les phases initiales de la formation de l'athérome, contribuant ainsi à réduire le risque d'infarctus.

Pour vraiment vous enlever toute culpabilité en ouvrant une bouteille de champagne après le thé, je vous rapporte l'étude qui vient d'être publiée dans le British Journal of Nutrition : le Docteur Jeremy Spencer de la très sérieuse Université de Reading en Angleterre vient de montrer avec son équipe de recherche en nutrition (4) que consommer quotidiennement deux verres (coupes ou flûtes... ce n'est pas précisé) est bénéfique pour le cœur, car le champagne contient aussi des polyphénols. Cela était déjà connu en particulier pour le vin rouge ; remercions les Anglais dont la qualité du vignoble est bien connue de s'intéresser à un des nos emblèmes nationaux.

Pour ceux qui détestent le bourgogne et le champagne, les polyphénols sont également présents dans les olives, les brocolis, les poireaux, les myrtilles et… les oignons, mais pour ces derniers, consommez-les de préférence le 2 Janvier après les bisous du réveillon… !!!

Meditas Cardio vous souhaite à tous un joyeux Noël et une bonne année 2010.

  1. Lofvenmark C .Perceived loneliness and social support in patents with chronic heart failure. Eur J Cardiovascul Nurs 2009 ,4 :251-8
  2. Thurston RC. Women,loneliness, and incident coronary heart disease. Psychosom Med 2009 , 8 : 836-42
  3. Naito Y. Tea and heart Health . J cardiovascul Pharmacol 2009,54 :385-90
  4. Vauzour D, Spencer JP. Moderate Champagne consumption promotes an acute improvement in acute endothelial-independent vascular function in healthy human volunteers.Br J Nutr. 2009 , 30:1-11

Prenez soin de vous…


Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°12 - Novembre 2009

Noël avant l'heure

Oui… oui… je sais… je vous dois des excuses pour avoir manqué à ma mission : j'ai failli ne pas écrire ce petit édito du mois de Novembre.

Je vous imagine courroucés de n'avoir pu lire ces quelques lignes ce mois-ci ou très inquiets pour ma santé imaginant je ne sais quelle catastrophe survenue brusquement et qui m'aurait abattu impitoyablement, par exemple, une attaque de virus H1N1 au coin d'un bois la nuit venue, ou peut-être étiez vous en réalité ravis de me deviner en vacances, allongé sur un hamac tendu entre deux cocotiers et faisant la sieste bercé par le bruit des vagues… mais je fantasme, je m'illusionne, je me trompe : vous ne vous êtes sans doute même pas rendus compte de cette absence !!! … Je vais cependant vous donner les vraies explications à ce retard car je sens bien que malgré votre apparente indifférence vous brûlez de savoir la vérité.

Rassurez-vous, je n'ai été ni victime d'un burn-out ni d'un stress aigu en regardant un match de foot guère estimable il y a quelques jours, j'ai tout simplement ouvert les cadeaux de Noël en avance, cela a pris du temps mais je n'étais pas seul, je n'ai pas fait cela en cachette, nous étions un petit groupe du Projet Méditas et nous avons commencé à ouvrir les cahiers d'évaluation du programme au terme de six mois de travail sur la gestion du stress.

L'ouverture a été assez longue, car la quasi totalité des participants a répondu et beaucoup nous ont fait part de réflexions personnelles. La place manque dans cet édito pour toutes les retransmettre et je ne mentionnerai que celle qui nous a le plus émus.

C'est une pépite d'or qui récompense les efforts investis dans ce projet aussi bien de la part des acteurs que des patients qui ont accepté de le suivre.

Je vous la donne en cadeau : « Grâce à ce projet, j'ai enfin compris que j'étais important et précieux ».

Un vrai cadeau de Noël en plein mois de Novembre. Que dis-je un cadeau, un vrai présent… car vivre au présent est un cadeau. Je n'en écris pas plus…


Prenez soin de vous…


Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°11 - Octobre 2009

Le corps et l'esprit

Connaissez vous Phineas Gage ? Peut être pas… Pour ma part j'ai fait sa connaissance il y a quelques années mais, jusqu'à présent je ne l'avais jamais vu. Il faut dire que Phineas est mort le soir du 21 mai 1860 et nous avions donc peu de chance de nous rencontrer au coin de la rue.

Laissez moi vous raconter son histoire peu commune : en 1848, Phineas est chef d'équipe dans le Vermont aux Etats-Unis sur un chantier de construction d'une ligne de chemin de fer. Le 13 Septembre, il doit faire sauter un rocher et commet une erreur dans la préparation de la charge explosive.

Il n'a pas le temps de se protéger. Une barre à mines lui traverse la tête, entrant par l'orbite gauche et ressortant par le haut du crâne à droite. Alors qu'il aurait dû être tué sur le coup Phineas ne perd pas connaissance et continue à parler.

Il est ramené dans sa chambre d'hôtel et il est pris en charge pendant quelques jours par le Docteur John Harlow. Quelques semaines plus tard, à la surprise générale, il ne semble pas présenter de séquelles neurologiques majeures : ni trouble de la marche, de la sensibilité, du langage, ni perte de ses connaissances ou de sa mémoire ; en revanche il présente des troubles de l'humeur, devient asocial et surtout il est incapable de faire des choix adaptés dans sa vie.

Antonio Damasio, neurophysiologiste américain, a particulièrement étudié, depuis la fin des années 80, le cas de Phineas allant même jusqu'à reconstruire virtuellement le trajet de la barre à mine sur un scanner. Ses conclusions sont intéressantes : Phineas a subi des lésions irréversibles dans une zone très particulière du cerveau, le lobe préfrontal gauche. Cette région complexe joue un rôle fondamental en recevant en particulier les informations issues du cerveau limbique, c'est à dire nos informations émotionnelles, celles qui proviennent directement de notre corps.

Antonio et Hannah Damasio emploient alors le terme de marqueurs somatiques et confirment que sans l'information provenant de notre corps, notre cerveau est orphelin : il pense, il calcule mais il n'est pas vraiment vivant, il n'a pas le « sentiment de soi » pour reprendre le titre du livre de Antonio Damasio publié en 1999.

Sans perception de ses émotions Phineas était devenu incapable de faire les bons choix pour orienter sa vie. Les chamans indiens faisaient la différence entre le souvenir froid qui ne concerne que mon cerveau (date de la bataille de Marignan…) et le souvenir chaud qui engage tout mon être, corps et esprit (le souvenir de l'odeur de la tarte à la mirabelle de ma grand-mère…). L'être humain est corps et esprit et il est vain de vouloir séparer ce qui n'a pas à l'être.

Pourquoi vous parler de Phineas aujourd'hui ? Il y a deux raisons à cela. La première est que je viens d'apprendre par un article du journal « Le Monde » que la seule et unique photo de Phineas vient d'être découverte par hasard : bien que borgne il s'agit d'un bel homme, solide, tenant fièrement à la main sa barre à mines tel un trophée. Il est émouvant de découvrir le visage de cet homme qui n'était jusqu'alors qu'un nom et un scanner reconstruit. Par l'émotion suscitée il redevient en quelque sorte vivant. Il quitte le souvenir froid pour devenir un souvenir chaud.

La deuxième raison est d'ordre symbolique. Les connaissances intellectuelles de notre cerveau sont fondamentales mais l'être humain est à la fois un corps et un esprit qui se complètent sans s'opposer. Il en est de même pour l'éducation thérapeutique qui doit favoriser une transmission de connaissances mais aussi une prise en charge psychosociale car comme l'être humain est corps et esprit, la maladie est biologique, psychologique et sociale.

Eduquer ce n'est pas seulement enseigner, c'est donner suffisamment confiance à l'autre pour qu'il puisse parler en son propre nom, avec ses mots et avec son corps.

Prenez soin de vous…


Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°10 - Septembre 2009

Fragilité et solidarité

20 Septembre et je n'ai toujours pas rédigé mon billet mensuel pour Meditas. Les vacances sont finies, je les ai surtout occupées à marcher. Je pensais donc vous faire un petit édito sur les bienfaits de la marche, véritable méthode de psychothérapie… je vous en parlerai plus tard, ce n'est que partie remise. J'ai retardé l'heure de vous écrire, car j'hésitais à vous faire part de ma colère, une saine colère, une saine indignation.

Des hommes et des femmes se suicident sur leur lieu de travail : ils n'ont pas trouvé d'autre issue à une situation qui leur semble insupportable. Ils n'ont plus d'autres solutions que de mettre eux mêmes fin à leurs jours. Le drame est trop grave pour le politiser ou jouer sur l'émotionnel. Bien sûr il y aura toujours une voix ambiguë pour expliquer que ces personnes étaient « fragiles ». J'aimerais qu'on m'explique ce qu'est la fragilité, j'aimerais qu'on me présente un être humain non fragile : la fragilité, c'est la définition même de l'humain.

Oui, l'être humain est fragile quand il est pris isolément, c'est notre « vivre ensemble » qui nous rend si fort : l'homme est vulnérable, l'humanité devient solide par la solidarité.

Ce qui arrive à ces hommes et à ces femmes peut nous arriver, nous sommes tous fait de la même terre, même les plus forts apparemment peuvent s'écrouler sur le lieu de travail ou en faisant leur jogging.

La raison en est simple, l'être humain est limité. Nous sommes constitués pour vivre en équilibre entre le pas assez et le trop. Pas assez de stimulation nous tue : sans aucune stimulation après la naissance et dans notre enfance nous serions morts comme les enfants abandonnés dans certains orphelinats ou notre cerveau ne serait pas ce qu'il est, nous serions débiles. Trop de stimulation peut nous tuer tout autant, à l'exemple de ces employés japonais qui travaillent plus de 24 heures d'affilée et s'écroulent morts d'épuisement.

L'être humain est fragile, vulnérable : ses possibilité d'adaptation sont limitées, n'en déplaisent à certains qui voudraient lui infliger des demandes qui elles peuvent, bien entendu, être illimitées.

Tenter d'aider d'autres humains à préserver leur santé en minimisant les effets du stress peut sembler utopique, peu nous importe : cette position du « un peu mieux » nous semble préférable à l'aveuglement des partisans et artisans du « toujours plus ».

Prenez très grand soin de vous…

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°9 - Août 2009

Le burn-out et le pouvoir de la vacance.

Il fait chaud, les orages grondent, les villes sont un peu plus vides, les plages beaucoup plus remplies… c'est le temps des vacances.

Grand fantasme qui voudrait nous faire croire que tous les Français partent se faire bronzer… c'est faux, beaucoup restent chez eux pour de multiples raisons, personnelles, familiales, financières. Et d'ailleurs être en vacances est-ce obligatoirement partir ?

Pour ma part, je voulais me mettre en vacances et ne pas écrire ce petit billet ce mois-ci, mais une actualité aussi brûlante que le soleil du mois de Juillet et ses attaques de burn-out m'y invitent pour un bref moment et juste pour quelques lignes.

Vacance : ce mot magnifique vient du latin « vacare » et désigne tout simplement un temps, un moment de liberté, de vide. Être en vacances, ce n'est donc pas nécessairement partir loin et occuper tout son temps de loisir à courir, à s'agiter, à visiter, à faire. Être en vacances, c'est accepter d'être libre et vide, de s'accorder du temps pour penser, pour flâner, pour méditer, pour contempler, du temps pour se retrouver soi-même, du temps pour rien ou presque rien… tout simplement du temps pour être, du temps pour respirer.

La respiration est un merveilleux condensé de vie : un temps actif (l'expiration), un temps passif (l'inspiration)… l'inspiration passive qui nous amène l'oxygène indispensable pour vivre est le symbole des vacances. Il ne peut y avoir de vie sans phase de repos, sans pause. Juste une pause pour se poser, se re..poser.

Il n'est pas besoin de partir loin pour être en vacances. Être en vacances est un état d'esprit au quotidien qui consiste à accepter et à rechercher ces temps apparemment vides. Ils sont en fait débordants de vie et source d'énergie inépuisable.

Savoir s'accorder un peu de vacance tous les jours, voilà la meilleure façon de lutter contre le burn-out…

Bonnes vacances (presque) permanentes à Tous.

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°8 - Juillet 2009

Moins de cheveux blancs pour les hommes verts…

Non, ce n'est pas le titre d'un mauvais film de science-fiction des années 50, mais parlons cependant cinéma.

« Home » : Peut être avez vous vu ce film choc de Yann Arthus-Bertrand dont les seuls défauts sont d'avoir rendu la pollution parfois esthétique et d'avoir filmé la terre depuis un hélicoptère bien sûr très polluant… Ce film a cependant le grand mérite de bien poser la question de l'avenir de notre planète bleue si nous continuons à croire que les ressources sont inépuisables et que la croissance et la consommation ressemblent à un arbre qui pourrait pousser jusqu'au ciel et plus haut encore... jusqu'à l'infini.

Pourquoi parler d'écologie ? Tout simplement parce qu'il n'y a aucune différence entre nous et la Terre. L'Homme appartient à la planète, l'Homme est une terre en réduction.

Nous devenons de plus en plus sensibilisés au respect de l'environnement, l'écologie est sur toutes les lèvres, du politique au fabricant de yaourt, mais qu'en est-il de notre écologie personnelle ? Que faisons nous pour notre développement durable ?

Bien sûr je ne verse plus mon huile de vidange dans le ruisseau au fond de mon jardin (en fait je ne l'ai jamais fait et je n'ai pas de ruisseau au fond du jardin !!!) mais est-ce que je fais vraiment attention à ce que je mange ? Ai-je conscience que parfois je me pollue par le tabac, par le sucre en excès, par l'inactivité ?

L'écologie personnelle, c'est aussi lutter contre la politique des hauts rendements. Cela ne veut pas dire être paresseux, mais admettre que, comme la terre, nos capacités de production ne sont pas infinies et que l'Homme peut aussi s'épuiser. Nos ressources personnelles ne sont pas infinies. La Terre peut devenir stérile si nous ne la respectons pas, nous pouvons devenir désertiques si nous ne respectons pas les limites qui sont les nôtres : c'est alors le burn-out.

Burn-out de notre planète, burn-out individuel… les mécanismes sont les mêmes. Dans l'écologie politique, ne négligeons pas une politique écologique individuelle : diminuons les engrais qui nous engraissent, mettons nous régulièrement en jachère, faisons le tri sélectif de nos activités, en un mot mettons nous au vert…

Mettons nous au vert pour avoir moins de cheveux blancs.

Comme dans les champs, avez vous remarqué que des fleurs poussent régulièrement sur le sommet de notre crâne : cheveux courts ou longs, blonds, roux, noirs, auburn… , enfin gris ou blancs quand les années passent. Parfois ces fleurs blanchissent précocement : une équipe japonaise (1) vient de montrer que le stress chronique entraine des modifications génétiques qui provoquent une altération au niveau des cellules responsables en particulier de notre couleur de cheveux (les mélanocytes).

Moins de cheveux blancs… encore une bonne raison de mieux gérer notre stress.

1.K. Inomata. Genotoxic stress abrogates renewal melanocytes stem cells by triggerins their différenciation. Cell ; 137,6 :1088-99

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°7 - Juin 2009

Connaissez vous le syndrome de l'étiquette ?

Rassurez vous, il ne s'agit pas d'une nouvelle maladie contagieuse propre à déclencher la panique et l'office mondial de la santé n'a pas encore mis sur ce syndrome le niveau d'alerte 6 et pourtant il le mériterait.

En effet le syndrome de l'étiquette est pandémique, il nous atteint tous, peu ou prou, et il fait aussi de multiples dégâts. De quoi s'agit-il ? C'est cette façon que nous avons de coller des étiquettes péremptoires et définitives sur les situations, sur les gens, sur nous-mêmes, le plus souvent d'ailleurs des étiquettes négatives.

Vous savez bien : " ça, je n'y arriverai jamais " " ah, non ça ce n'est pas pour moi " " lui, c'est vraiment pas un tendre " " de toutes façons j'ai toujours été comme ça, mon père l'était aussi ".

Coller une étiquette nous rassure. Les humains ont toujours pensé que donner un nom ou nommer une situation permet de la maitriser, cela nous permet aussi d'éviter le changement qui est source d'inquiétude. Coller une étiquette nous permet surtout d'ignorer que tout être humain (moi, les autres) ou toute situation est complexe, contenant à la fois une réalité et son contraire.

Quelques exemples caricaturaux d'étiquette : les Anglais mangent mal, les Italiens sont roublards, les Français sont râleurs et les Suisses sont lents, ("y'a pas le feu au lac"… à prononcer avec un fort accent trainant de préférence).

Les Suisses sont peut être lents mais ils sont innovants. La preuve : leur soi-disant lenteur vient encore de frapper un grand coup dans leur dernier référendum (votation populaire). Ils ont décidé à une majorité de 67% d'inscrire les médecines complémentaires dans leur constitution.

Le texte précise " la Confédération et les Cantons pourvoient dans les limites de leurs compétences respectives à la prise en compte des médecines complémentaires ".

Vous imaginez, une prise en compte des méthodes de relaxation, d'hypnose, de sophrologie, des autres techniques de psychothérapies pour améliorer la santé… décidément la Suisse est vraiment lente et en retard... ( Humour…)

Souhaitons que cette lenteur suisse soit aussi contagieuse que le syndrome de l'étiquette et qu'elle nous fasse vite progresser sur le même chemin.


Article du Monde, le 22 Mai (Agathe Duparc) : "En Suisse, les médecines alternatives sont plébiscitées".

Prenez soin de vous…

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LE M'EDITO N°6 - Mai 2009

En Mai, Rions de bon cœur

Les dictons sur le mois de Mai fleurissent aussi facilement que les arbres de nos jardins, il est par conséquent tout à fait permis d'en inventer un nouveau, ce d'autant que celui-là est d'actualité.

La vie est étonnante et parfois elle nous donne à réfléchir sur le sens du hasard. Le hasard, vous savez bien, cette chose étrange qui parfois met sur votre chemin ce que vous cherchiez, ou vous fait rencontrer au bon moment la personne dont vous aviez justement besoin.

Hasard surprenant, étonnant, parfois bouleversant, ou simplement amusant comme celui qui réunit ce petit message à celui du mois d'Avril.

Il y a quelques semaines en effet, je vous ai parlé de la colère et de ces effets néfastes pour le cœur et pour la santé de façon plus générale. A la fin de ce petit billet, je recommandai de rire le plus souvent possible et d'utiliser ce remède sans aucune retenue car il n'y a aucun effet secondaire néfaste au rire, rien que des résultats positifs.

A peine avais-je terminé cet éditorial que… comble du hasard… une bonne et intéressante nouvelle est tombée en direct du dernier congrès Américain de Physiologie. Une équipe de chercheurs a eu l'idée d'un protocole très simple : faire rire un groupe de patients diabétiques et les comparer un an plus tard à un groupe témoin ne riant pas (il s'agissait pour les rieurs de se fendre la bobine pendant une demi heure par jour en regardant des films comiques qu'ils sélectionnaient eux mêmes).

Il s'agit d'une étude sur un petit groupe mais les résultats sont surprenants : les marqueurs inflammatoires de l'athérome (CRP pour les spécialistes…) baissent de plus de 60% chez les rieurs et le bon cholestérol augmente de 26% dans ce même groupe des rigolos. Ce résultat est d'autant plus intéressant qu'à ce jour aucun traitement médicamenteux n'est capable d'augmenter de façon aussi significative le bon cholestérol qui protège nos artères.

Du rire, du rire, de la bonne humeur, une activité régulière et une nourriture équilibrée et nos artères se porteront mieux.

Si vous trouvez que ces conseils vous prennent trop de temps (marcher une demi-heure, rire une demi-heure, vous relaxer une demi-heure… etc), vous pouvez bien sûr marcher tout en méditant et en croquant une carotte ou une pomme mais attention à ne pas vous étrangler en riant à gorge déployée devant le plaisir de vivre…

Rions de bon cœur...

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°5 - Avril 2009

Avez vous vu ce projet de loi en discussion depuis quelques jours à l'assemblée nationale sur proposition de notre Ministre de la bonne humeur et de la joie de vivre ? Cette loi envisage de condamner toute personne se mettant en colère de façon récidivante (la loi mentionne trois colères dans l'année) à exprimer sa rage devant un jury en ayant pris soin de mettre un nez de clown et ce jusqu'à ce que les juges et le condamné soit pris d'un fou-rire inépuisable…

Poisson d'avril… pas tant que cela !!! Cette coutume (sans le nez de clown bien sûr) qui nous semble étonnante est entretenue par le peuple Inuit chez qui le rire est sacré. Les Inuits apprennent à rire à leurs enfants, car pour eux le rire est harmonie, ordre et ouverture au monde.

Faux poisson pour parler d'un vrai poison : la colère.

Qui ne s'est jamais mis en colère ? Personne sans doute et certaines colères semblent justifiées. Il faudrait plus justement écrire certaines indignations sont justifiées. Le pouvoir d'indignation devant une violence, une injustice est une richesse de l'âme humaine. La colère est un poison humain, car elle blesse plus sûrement celui qui la ressent que celui contre qui elle est dirigée.

Pourquoi vous parler de colère en ce début de mois d'Avril alors que tout invite à la douceur et à l'amour (au début du vingtième siècle le 1er Avril était la fête du bonheur et de l'amour) : les arbres en fleurs, les soirées qui rallongent comme par enchantement, la douceur du soleil, les chants de parade amoureuse des oiseaux… et pas seulement des oiseaux ?

Tout simplement à cause d'un article qui vient de sortir dans le très sérieux Journal of American College of Cardiology qui nous démontre, multiples preuves à l'appui, que la mauvaise humeur (l'hostilité) et surtout la colère sont très néfastes non seulement pour les patients ayant déjà des soucis cardiaques, mais également pour tous ceux qui se sentent apparemment en pleine santé : la colère augmente de façon importante le risque d'infarctus et de mort subite. Certes, cela était déjà connu mais cette métaanalyse (revue complète de toute la littérature sur le sujet) permet maintenant de pouvoir l'affirmer sans contestation possible.

Un petit conseil du Docteur Meditas : la prochaine fois que vous sentez monter en vous la colère, ne cherchez pas à la contenir, isolez vous, mettez vous face à une glace (une petite glace avec juste votre visage peut faire l'affaire, mais avec un grand miroir de façon à vous voir entièrement des pieds à la tête, c'est encore plus drôle), mettez un nez de clown (0,80 euro) et exprimez votre colère face à vous même… L'effet est radical : personne ne résiste plus de 3 minutes à ce doux supplice sans exploser de rire… Vous allez sentir votre corps s'alléger, la colère vous quitter, vous serez passés du stade de la colère à l'humour ou à celui de l'indignation qui n'est pas néfaste et vous permettra d'agir de façon constructive sans vous blesser.

PS : si la posologie n'est pas suffisante, abusez du remède, il n'y a aucun effet secondaire néfaste du rire.

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°4 - Mars 2009

En Mars… des histoires de cailloux.

Raconter des fables et des contes est une des solutions que l'être humain a trouvé pour exprimer ce qui est essentiel pour lui, ce qui est du domaine de l'indicible. Pour certains, à la première lecture, ces histoires paraissent un peu enfantines, simples, niaises sans doute parce qu'elles cachent une part de vérité qui dérange notre quotidien mais, si nous nous laissons toucher elles ont le pouvoir modifier profondément notre vision des choses.

Deux fables de cailloux pour vous accompagner ce mois ci.

La fable du sable et des gros cailloux :

Un jour, un vieux professeur de l'école nationale d'administration fut engagé pour donner une formation sur la gestion efficace du temps à un groupe d'une quinzaine de dirigeants de grosses entreprises. Ce cours constituait l'un des sept ateliers de leur journée de formation. Le vieux professeur n'avait donc qu'une heure pour exposer son sujet.

Debout devant ce groupe d'élite, il les regarda un par un, lentement, puis leur dit : "nous allons réaliser une expérience". De dessous la table qui le séparait de son auditoire, il sortit un immense pot de verre qu'il posa délicatement en face de lui. Ensuite, il sortit environ une douzaine de gros cailloux et les plaça minutieusement un par un, dans le grand pot. Lorsque le pot fut rempli jusqu'au bord et qu'il fut impossible d'y ajouter un seul caillou, il leva les yeux vers ses élèves et leur demanda : "est-ce que ce pot est plein" ? Tous répondirent : "oui"

Il attendit quelques secondes et ajouta : "vraiment" ? Alors il se pencha de nouveau et sortit un récipient rempli de gros gravier. Avec précaution, il versa ce gravier sur les gros cailloux, puis brassa légèrement le pot ; les morceaux de gravier s'infiltrèrent entre les cailloux… jusqu'au fond du pot. Le vieux professeur leva les yeux vers son auditoire et redemanda : "est-ce que ce pot est plein ?" Cette fois, ses brillants auditeurs commençaient à comprendre son manège. L'un d'eux répondit : "probablement pas !" "Très bien !" répondit le vieux professeur.

Il se pencha à nouveau et cette fois, sortit un récipient de sable. Avec attention, il versa le sable dans le pot. Le sable alla remplir les petits interstices entre les gros cailloux et le gravier. Encore une fois, il demanda : "est-ce que ce pot est plein ?" Cette fois, sans hésiter et en chœur, tous les dirigeants répondirent : "non !" "Parfait !" dit le vieux professeur.

Puis, comme s'y attendaient ses prestigieux élèves, il prit le pichet d'eau qui était resté sur la table et remplit le pot jusqu'à ras bord. Il leva alors les yeux vers son groupe et demanda : "quelle grande vérité nous démontre cette expérience ?" Pas fou, le plus audacieux des dirigeants, songeant à l'intitulé du séminaire de formation, répondit : "cela démontre que même lorsque l'on croit que notre agenda est complètement rempli, si on le veut vraiment, on peut y ajouter plus de rendez-vous, plus de choses à faire".

"Absolument pas", répondit le vieux professeur, "ce n'est pas du tout cela. La grande vérité que nous démontre cette expérience est la suivante : si on ne met pas les gros cailloux en premier dans le pot, on ne pourra plus jamais les faire entrer ensuite". Il y eut un profond silence, chacun prenant conscience de l'évidence de ces propos.

Le vieux professeur leur dit alors : "quels sont les gros cailloux dans notre vie ? Notre santé ? Notre famille ? Réaliser nos rêves ? Faire ce que nous aimons ? Apprendre ? Défendre une cause ? Nous relaxer ? Prendre du temps ?… ou tout autre chose ? Ce qu'il faut retenir, c'est l'importance de mettre nos gros cailloux en premier dans notre vie, sinon nous risquons de ne pas réussir… notre vie. Si nous donnons priorité aux peccadilles (le gravier, le sable), nous remplirons notre vie de peccadilles, et nous n'aurons plus suffisamment de temps précieux à consacrer aux éléments essentiels de notre vie. N'oublions jamais de nous poser la question : quels sont les GROS CAILLOUX dans ma vie ?"

La conférence avait duré un quart d'heure. Le vieux professeur regarda son auditoire avec un large sourire, fit un petit salut et s'en alla.

La deuxième fable du casseur de cailloux est beaucoup plus courte mais tout aussi riche de sens :

Un homme voit au bord de la route des casseurs de cailloux.

Le premier casseur de cailloux a le visage torturé. L'homme lui demande : "Qu'est-ce que vous faites?" Le casseur de cailloux répond : "J'exerce un métier affreux, je casse les cailloux, c'est dur, j'ai mal au dos, j'ai soif, j'ai chaud et en plus je suis mal payé !"

L'homme s'approche du deuxième casseur de cailloux, qui n'a pas l'air de trop souffrir : "Qu'est-ce que vous faites ?" "Je casse des cailloux. Je travaille en plein air et je suis bien content d'avoir ce métier pour nourrir ma famille. C'est bien."

Le voyageur s'approche du troisième casseur de cailloux, qui a un visage souriant, radieux. "Que faites-vous ?" "Vous le voyez bien ! Je bâtis une cathédrale !"

Le geste est le même, mais c'est le sens que nous attribuons à ce que nous faisons qui provoque toute la différence.

En Mars pour mieux gérer notre stress conservons ces "petits cailloux" dans notre poche, cherchons à redécouvrir quelles sont les choses essentielles dans notre vie et essayons de modifier notre point de vue sur le monde… c'est la voie la plus rapide et la plus efficace pour… changer un peu le monde.

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°3 - Février 2009

En Février… réveillons la femme qui est en nous.

Depuis que le monde est monde, hommes et femmes coexistent et cohabitent avec plus ou moins de bonheur et de difficultés et assez de désir pour permettre à l'espèce humaine de se renouveler.

Bien entendu les hommes et les femmes sont différents et même un observateur peu doué cliniquement peut aisément constater quelques dissemblances… mais au delà de ces distinctions plus ou moins marquées, la psychanalyse nous a rappelé ce que la sagesse du Tao enseigne depuis longtemps : il existe en chaque femme et en chaque homme une part masculine et féminine plus ou moins importante.

Un article (1) paru il a quelques jours dans "European Journal Heart Failure" nous apprend que les cardiologues de sexe féminin prennent mieux en charge leurs patients en insuffisance cardiaque et respectent mieux les recommandations actuelles de traitement. Les auteurs expliquent cette différence par une plus grande empathie féminine et une meilleure écoute des patients.

Cet article trouve un écho particulier dans le dernier numéro (2) de "Psychosomatic Medicine" où Barry Zaret, professeur de cardiologie à Yale, raconte comment il a sauvé sa femme d'un arrêt cardiaque au moment d'un infarctus. Ce médecin, cultivé, exprime avec beaucoup de sensibilité comment il a utilisé sa mémoire corporelle pour pratiquer les gestes de premier secours, comment il a employé toutes les connaissances théoriques et pratiques acquises durant de longues années de formation mais surtout il met en lumière que la médecine est avant tout humaine, faite d'un subtil mélange d'action et d'écoute, de science et d'intuition, de soin et d'empathie.

Je ne sais pas si les femmes sont de "meilleurs" médecins que les hommes, ce qui est certain c'est que le monde est équilibre entre le jour et la nuit, le soleil et la lune, le Yin et le Yang, le masculin et le féminin, le sympathique qui véhicule notre stress et le parasympathique qui nous apaise.

Prendre soin de soi c'est prendre en compte toutes les facettes de l'être humain en associant deux aspects qui ne s'opposent pas mais se complètent : l'efficacité de notre face masculine et l'empathie de notre face féminine, que nous soyons patient ou soignant… et bien sûr que nous soyons homme ou femme.

En Février, réveillons le féminin qui est en chacun de nous…
  1. Baumhäkel M, Müller U, Böhm M. Influence of gender of physicians and patients on guidelines recommended treatment of chronic hert failure in a cross-sectionnal study. Eur J Heart Fail. 2009 En ligne.
  2. Zaret BL. Purim in CPR. Psychosom Med, 2009 ; 71 : 6-13
Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°2 - Janvier 2009

En l'an NEUF …le bonheur sera contagieux…

31 Décembre 2008… 1 janvier 2009… une année se termine… une autre débute…

Avez-vous remarqué comme l'être humain est extraordinaire ? Il classe, il range, il nomme, il découpe le temps en tranches, il se nomme expert, il fait des prédictions sur cette année et annonce à coup sûr qu'elle sera difficile.

Affirmer que cette année sera noire, c'est lui mettre une étiquette négative sur le dos avec notre cerveau bourré d'a priori, persuadé que la situation présente doit obligatoirement être regardée à la lumière d'un passé bégayant. Lutter contre le stress, c'est aussi apprendre à regarder une situation comme elle est, c'est à dire totalement nouvelle. La nouveauté peut engendrer la peur, mais c'est aussi une formidable occasion de vie.

Affirmer que cette année sera noire, c'est ne voir qu'une face des choses, alors que toute chose ou tout évènement contient son contraire. L'ombre et la lumière sont les deux jumeaux enfantés par le soleil… Tout dépend de la façon de regarder les choses : ainsi le chemin qui monte est identique à celui qui descend. Seul le regard a changé.

Pour cette année nouvelle l'équipe de MEDITAS Cardio vous souhaite la confiance : confiance pour contempler le monde en y portant chaque jour un regard neuf, confiance dans les capacités fabuleuses de chacun d'entre nous, confiance en l'autre et en ses surprenantes potentialités, confiance en la vie qui nous réserve parfois des surprises qu'il faut savoir saisir quand elles se présentent.

Et pour commencer l'an neuf une petite nouvelle réjouissante du très sérieux " British Medical Journal " qui nous dit, dans une étude publiée dans le numéro du 5 Décembre 2008 à partir de la cohorte de Framingham, que le bonheur est contagieux… Quelle belle nouvelle pour les scientifiques, mais je suis persuadé que vous le saviez déjà…

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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LE M'EDITO N°1 - Décembre 2008

Décembre 2008 : le site Meditas Cardio ouvre ses portes.

Que tous ceux qui ont travaillé à l'élaboration de ce programme soient ici vivement remerciés ; un merci tout particulier à Jean-Claude Busac dont les compétences informatiques reconnues (Médecin Maître Toile) ont permis la naissance officielle de ce site.

La mortalité cardiovasculaire ne cesse de diminuer depuis 40 ans. Elle vient récemment de passer en deuxième position derrière celle due au cancer. Les cardiologues sont à juste titre assez fiers du travail accompli en terme d'efficacité thérapeutique et préventive. Cependant certaines zones d'ombre persistent, en particulier l'impact négatif des facteurs de risque comportementaux (alimentation, tabac, obésité, sédentarité).

L'objectif du Programme MEDITAS CARDIO est d'améliorer la prise en charge des facteurs psychosociaux en cardiologie par l'éducation thérapeutique ; ce facteur de risque est d'une importance majeure, car il influence la maladie artérielle de façon directe et indirecte en aggravant les autres facteurs de risque. Il est trop souvent négligé par manque d'information.

Ce site est donc ouvert à tous ceux qui souhaitent se documenter à la fois sur les effets du stress en cardiologie et sur les méthodes de sa prise en charge : patients inclus dans le programme, professionnels de la santé, simple curieux.

N'hésitez pas à nous faire part de vos suggestions, cela nous permettra de faire vivre le site.

Pour ce mois-ci, un petit texte en cadeau pour mieux vivre l'instant présent :

On demanda un jour à un homme qui savait méditer, comment il faisait pour être recueilli en dépit de toutes ses occupations ; il répondit :

Quand je me lève, je me lève. Quand je marche, je marche. Quand je mange, je mange. Quand je parle, je parle.

Les gens l'interrompirent en lui disant : " Nous faisons de même, mais que fais-tu de plus ? "

Quand je suis assis, je suis assis. Quand je me lève, je me lève. Quand je marche, je marche. Quand je mange, je mange. Quand je parle, je parle.

Les gens lui dirent encore une fois : " C'est que nous faisons aussi ! "

Non, leur répondit-il : Quand vous êtes assis, vous vous levez déjà. Quand vous vous levez, vous courez déjà. Quand vous courez, vous êtes déjà au but...

Sachons rester dans l'instant présent, cela est difficile, mais c'est la voie royale pour mieux apprivoiser le stress.

Prenez soin de vous…

Docteur MEDITAS
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Prenez soin de vous

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